lundi 28 décembre 2015

Tout n'est qu'équilibres...


Tout n'est qu'équilibres.
Entre haines et peurs,
Tristesses et bonheurs,
Tout n'est qu'équilibres.

Car celui qui est libre,
Qui vit en vrai amateur,
Qui aime à toute heure,
Dont l'espoir vit, vibre...

Cet être, au crépuscule,
Entre ombres et clarté,
De souillure à pureté,

Cette âme majuscule
Révélera votre beauté
Lors d'un éternel été...





Adieu, 2015...
Vivement 2016 !

jeudi 24 décembre 2015

Marchons au marché...



ALLEZ, VENEZ MESDAMES ET MESSIEURS ! LE KILO DE COURGETTES À UN EURO ! LES POIREAUX DE MON EXPLOITATION SONT FRAIS DE CE MATIN ! VENEZ MESDAMES ET MESSIEURS !

Gilles aimait bien se balader au marché, le jeudi matin. Les vendeurs de produits frais renchérissaient de rengaines alléchantes, la queue à l'imposante caravane de monsieur Guilmau, le boucher, s'allongeait au fil des minutes... Et bien sûr les badauds, tous autant qu'ils étaient, arpentaient la place du Plénître et la place Lamagdelaine... Tout cela était un théâtre matinal fort plaisant. Ici, les cris du poissonnier se heurtaient aux accroches du charcutier, telles de puissantes vagues contraires. Là, un vendeur de T-shirts fantaisie paradait avec les nombreux motifs que ses produits possédaient devant trois clients fort intéressés, alors que quatre autres se bousculaient devant un même coin de son étal.
Place Lamagdelaine, le marché de Noël régnait en maître, avec son vin chaud, ses décorations chatoyantes et kitsches, ses vendeurs de produits locaux, ses ballons de baudruche que de jeunes enfants emmitouflés dans des doudounes trop grandes pour eux tenaient en main les yeux émerveillés...

Ce jeudi-là, Gilles n'était pourtant pas sur le marché. Il n'arpentait pas plus les autres rues d'Alençon en quête de belles images à prendre.
Il aurait bien pu, mais ce n'était pas le jour adéquat.
Tant pis pour la salade du jour...

Car en effet, à cette heure, Gilles venait de sonner à la porte de ses parents, arrivé peu avant sa sœur, sa nièce et l'heureux père de celle-ci.
La fraîcheur de l'air rajoutait à la tranquillité et au solennel de cet instant.
En ce jour, Gilles fêtait en famille la promesse d'un printemps qui ne mettrait, si les anciens dieux le voulaient, que trois mois à se manifester.


Espérant une belle journée, Gilles ne prit que deux précautions : quelques incantations dont il avait le secret... Et un petit mot sur ce blog, pour que quiconque amené à le lire prenne le temps de sourire...



JOYEUX NOËL !
(Certes, Noël c'est demain, ET ALORS ?)


dimanche 20 décembre 2015

Dans les ombres de l'hiver...


Nuit noire sous la voûte.
De faibles lueurs oscillent
Au rythme des psaumes.

Plop ! une grosse goutte de cire tombe
Tandis que le bourdon sonne ! 

mercredi 16 décembre 2015

Conciliabule à Goult...


Une semaine plus tôt, j'avais reçu un curieux courriel, signé d'un sibyllin "B.", au contenu surprenant. En effet l'adresse de l'expéditeur était une de celles que d'obscurs pirates informatiques se refilent sous le manteau afin d'accomplir leurs basses œuvres de chapeaux noirs. Or ce "B." me connaissait de toute évidence, alors même que le milieu des pirates informatiques ne pouvait me connaître ni de près ni de loin.
Tout à mes réflexions, je relisais une fois de plus le contenu de ce courriel, devant le lieu du rendez-vous fixé ce mardi 15 à 16h sonnantes. Quel hurluberlu irait se ficher dans un endroit pareil ? La chapelle de Goult n'était clairement pas un endroit habituel pour un "hacker".

Monsieur Gilles,

Nous nous sommes rencontrés durant le mois d'Octobre. Comme convenu, je vous adresse rendez-vous en la chapelle de Goult mardi prochain à 16h précises. Entrez seul et asseyez-vous sur le premier banc à droite. J'ai besoin de m'entretenir avec vous dans un lieu discret.

Sincères Salutations,
B.

Fermant prestement l'application Gmail de mon smartphone, je poussai la lourde porte de bois de la chapelle et entrai d'un pas hésitant dans la pénombre.
Je ne vis sur l'instant personne, mais en m'asseyant à l'endroit indiqué, je fus surpris de sentir dans mon cou le souffle aviné de quelqu'un...

... Bruno.

- Bonjour, monsieur Gilles. Je vois que vous êtes à l'heure, c'est bien. Je crains que nous n'ayons pas eu le temps de nous entretenir suffisamment longtemps lors de notre dernière rencontre... Et j'ai deux choses pour vous : un service rendu et un service à rendre. 

Se relevant, Bruno vint s'asseoir tout à côté de moi, d'un air décontracté et néanmoins... étrange.


- Que voulez-vous ? Vous... Vous n'êtes pas un homme normal, n'est-ce pas ?

- Peu importe qui je suis, monsieur Gilles. L'important c'est que je puis vous aider, et que vous pouvez m'aider. Car, voyez-vous, les rumeurs circulent vite dans les environs. Je sais de quel mal vous êtes atteint depuis votre prime enfance. Je connais le moyen de vous en délivrer... Si vous daignez me rendre un tout petit service. Trois fois rien, et néanmoins beaucoup pour moi.


- Qu'est-ce qui me dit que vous pouvez m'ôter cet enchantement ? Depuis des centaines d'années de vie sur cette terre, personne n'a su me désenvoûter... Et je ne suis d'ailleurs pas sûr de vouloir m'en séparer, vu les nombreuses occasions où cet enchantement m'a été utile.


- Ah, monsieur Gilles, si ce n'est que cela, je puis simplement rendre cet...enchantement plus discret. Il est important pour votre propre survie qu'il le soit, car vous le savez... L'hiver vient.
Vous ne souhaitez tout de même pas affronter toute la puissance déchaînée de l'hiver sur votre petite personne ? Et je ne vous parle pas de ce qui arriverait à votre chat.

À ces mots, un courant d'air aigre et glacial hurla à travers l’entrebâillement de la porte, accompagné par le grincement des gonds millénaires qui la soutenaient.


- L'hiver vient... Avec lui s'éveillera Njörd, n'est-ce pas ? ...Je crains d'être embarqué dans une histoire qui me dépasse... Et j'entrevois un mythe derrière votre masque. Que voulez-vous ?



- Rien de bien difficile pour un être aussi puissant que vous, Gilles, vous vous en doutez.
Je souhaite simplement que vous alliez libérer chez un de vos amis du village de Radon deux boucs qui sont chers à un de mes fils. Je les ai égarés il y a longtemps et maintenant qu'ils ont refait surface, je n'aspire qu'à les lui rendre... Mais je redoute d'approcher d'Écouves en ce moment; depuis cette histoire de bête affamée, j'y suis pratiquement persona non grata. Faites attention, vous aussi, tout de même... Il ne fera pas bon rôder par ici demain.


- Je n'aime guère être votre pantin, Bruno... J'ose espérer que vous ne me filouterez pas le moment venu. Je pourrais moi aussi avoir une botte secrète qui vous est réservée.


- Gilles, voyons... Ceci est important pour vous, mais vital pour moi... Et pour ma famille. Vous ne le regretterez pas. Je le jure sur mon petit Gami.


Pensifs, nous regardions ensemble le vent qui faisait trembler les vitraux de l'endroit... A quoi allais-je devoir m'attendre ?

Bruno se tourna vers moi et, prenant mon bras, me chuchota sur un ton angoissé :


- Gilles, faites vite, car n'oubliez pas : l'hiver est proche !

samedi 12 décembre 2015

La Bête...

Au cœur de la basilique, tout semblait calme, apaisé.
Pourtant, dans l'âme de Gilles, resté en arrière après la sortie des ouailles et du Père Clément, résonnaient encore les mots, menaces, imprécations de ce curé...

Mes bien chers frères ! L'heure est grave, car en effet Satan frappe à notre porte. Je ne vous ferai point l'offense de vous rappeler quels horribles événements ont eu lieu cette semaine ! Cette barbarie, cette sauvagerie, sur une pauvre fillette de douze ans ! Puisse son âme connaître la paix éternelle et Dieu l'accueillir en son sein.
Mes frères ! Après en avoir conféré avec Monseigneur l’Évêque et Père Baptiste, l'exorciste... Et par la volonté de notre Seigneur Tout Puissant Jésus Christ, l’Église appelle la bonne population du diocèse à la révolte contre les Forces du Mal ! Nous devons trouver cette bête infâme qui assassine, égorge et massacre sans vergogne les plus pieux de nos enfants ! Ce monstre doit être détruit coûte que coûte, car c'est un monstre, un démon n'en doutez pas ! Invoqué par de mauvaises gens, adeptes de l'occultisme païen le plus débridé, oui ! Le groupement de gendarmerie de l'Orne appelle lui aussi à la mobilisation ! 

Que les chasseurs prennent leurs armes ! Que les laïcs de notre bonne Église organisent la mise à l'abri de tous les villages d'Écouves. Dès demain, deux prêtres dominicains me rejoindront afin de bénir l'eau qui piégera la Bête à l'intérieur d'Écouves et de sanctifier les munitions qui la tueront.

C'est à toute la communauté chrétienne de l'Orne de faire œuvre de pénitence et d'une grande piété ! S'il en est parmi vous qui ne se sont point confessés, je vous encourage à me voir dès la fin de la messe, pour que vous vous soulagiez de vos péchés.
Car oui, le démon est à nos portes ! Je le dis : Satan a trop longtemps manipulé de braves chrétiens, les amenant à ne croire en notre Seigneur et Sauveur qu'aux occasions des mariages et des enterrements. J'en vois certains dans nos rangs, présentement.
Qu'ils soient confortés dans leur décision de retrouver la foi pure et véritable en notre Sauveur le Christ. Ces derniers seront aussi attendus au confessionnal, s'ils souhaitent se purifier et être sauvés.


Mes frères ! Les massacres commis à Écouves ne sont pas l’œuvre d'un déséquilibré ou d'un animal sauvage égaré, quoi que vous en pensiez.
Ensemble, nous vaincrons le Démon qui rôde dans la forêt... Ou que Dieu nous ait en sa Sainte Garde...

À présent prions pour notre salut ! Prions pour la réussite de la battue de mercredi prochain ! Prions pour nos âmes et celles des courageux chasseurs et gendarmes qui iront la traquer jusque dans sa tanière s'il le faut ! 

Ô Notre Seigneur Jésus Christ...


Gilles se tenait devant les fonts baptismaux, observant son reflet. Des pas retentirent non loin. Gilles se détourna prestement de sa contemplation et, alors qu'il prenait le chemin de la sortie, sentit le regard lourd de suspicion du Père Clément, alternant entre les eaux lustrales et sa nuque.

La prochaine pleine lune s'avérait dangereuse...

mardi 8 décembre 2015

L'Automne s'en va...

L'Hiver vient.

L'Hiver vient et déjà le froid envahit nos contrées tempérées. Ce n'est pas pour me déplaire : le froid piquant de Janvier a quelque chose de vivifiant, quelque chose de revigorant.
Cette période sonne aussi comme un appel de la Mort. Jadis, nombreux étaient les plus âgés à ne pas passer l'Hiver. De nos jours, cette expression est moins véridique; nous ne manquons en effet ni de chauffage ni de techniques médicales pour égaliser les périodes de décès. Pourtant l'Hiver est toujours une période critique pour nos aînés.

Pourtant ce ne sont pas le Froid ou la Neige qui masquent la marche de la Mort.
La Mort se drape dans les linges de la Nuit. Cette Nuit qui avance à grands pas à notre rencontre.
La Nuit de tous les cauchemars, de toutes les angoisses.
La Nuit des démons, cachés sous les lits, dans les malles, les armoires, qui font grincer les portes, les escaliers, font claquer les volets et qui cachent la douce lueur de la Lune.

La Nuit, oui. La Nuit vient sur nous.

Se pourrait-il qu'un jour elle ne parte plus jamais ? Elle qui s'annonce par l'avancée de l'Obscurité dans le cœur des Hommes ?

La Nuit Éternelle approche. Craignez-la et préparez-vous...

vendredi 4 décembre 2015

Les conseils mal avisés du Tonton...


Qu'est-ce que je vous sers, messieurs ?

- Un chocolat viennois, s'il vous plaît !

- Vous avez quoi en pression ?

De nos jours, l'alcoolisation responsable se perd. Oh, certes, il y a eu de tous temps des alcooliques, des gens sobres et des buveurs raisonnables.
Mais je suis au regret de constater que de plus en plus de mes concitoyens perdent le goût des bonnes choses.
Les buveurs au goût sûr se raréfient, mais plus encore les buveurs d'alcools de mauvaise qualité se multiplient.
Ce n'est pas qu'une vue de l'esprit, les nouveaux rites liés à l'alcool dans de très nombreuses grandes écoles et dans les facultés de médecine ont tôt fait d'apprendre le goût de l'ivresse plutôt que le goût lui-même des différents alcools.
Surtout, il n'apprend en définitive que l'envie de boire beaucoup, si possible à un haut titrage, sans se préoccuper de la qualité de la boisson.
Pourtant, il est clair qu'un apprentissage au goût des bons alcools est la première étape d'une lutte efficace contre les accidents de la route liés à l'alcool, contre les délits liés à l'alcool ainsi que, dans une certaine mesure, contre l'alcoolisme.

Les bons alcools sont rarement des alcools faciles à boire. Ceux qui le sont se paient chèrement ensuite en luttes intestines.
Même le cidre, le fameux alcool normand, n'est pas un alcool aussi facile à domestiquer lorsqu'il est de qualité.
Il reste toujours terriblement tentant d'en vider une bouteille entière à deux, certes.
Fort heureusement, le cidre et le poiré font partie de ces bons alcools qui se paient sur le trône. Ainsi le corps s'arrête-t-il de boire bien avant qu'on en devienne ivre mort.

Je pense pouvoir me considérer comme un buveur très raisonnable. La raison ? Je ne bois d'alcool qu'occasionnellement, généralement dans des contextes festifs familiaux, rarement au bar, mais surtout je savoure mon unique verre.
Qu'il s'agisse de champagne, de cidre, de bordeaux, de poiré, de pommeau ou même de bière, il me paraîtrait triste de boire des alcools de piètre qualité, d'autant plus que je m'astreins à un seul verre en tout.
Aussi, il est bon de prendre une qualité plus élevée. Quitte à n'en prendre qu'un peu et occasionnellement, autant en prendre aux arômes riches.

Mon père, le jour de ma majorité, m'invita à prendre ma première bière dans un bistrot bien connu d'Alençon et m'énonça cette maxime qui restera à jamais dans ma mémoire : "Fils, n'oublie jamais que la bière se boit à l'unité, car c'est toujours la première la meilleure.".
De bien sages paroles que je me suis empressé d'appliquer à toutes sortes d'alcools.

Et justement c'est une bière de même genre que ma toute première que me voici en train de humer et de savourer dans ce bar, bien assis sur cette banquette rouge, toujours fidèle à ma légendaire sobriété, et...


Heulà ! Déjà vide ?
Patron, un autre distingué pour bibi ! Mettez ça sur mon ardoise, je reviendrai demain matin la payer avec ma conso du jour !

Et un distingué pour Gillou ! Un ! Mais n'oublie pas de payer cette fois !


 [ndTontonGilles : Ne rions qu'un court instant, les enfants. L'alcool est à consommer avec modération, sérieusement. Profitons d'un seul verre d'alcool par jour, profitons de bons alcools dans de bonnes conditions, en refusant la tentation du second verre. Voici comment l'on devient un adulte responsable et conscient des dangers qu'entraînent l'abus des bonnes choses. Et n'oubliez pas qu'entre boire et conduire, il est impératif de choisir. De plus, si l'alcool devient un besoin plutôt qu'un plaisir, consultez. Il en va de votre santé. Sinon vous pouvez aller sur Alcool Info Service.
Enfin, sachez que ce billet n'est pas une publicité cachée. J'ai simplement pris en photo la bière qui seyait le mieux à mes goûts dans un bar donné. Après tout, je prends ce que je veux en photo !]


mardi 1 décembre 2015

Plus de 50 nuances de divinités...



Au nom de la Lumière Divine, tant de jugements arbitraires furent rendus...

Au nom de la Lumière Divine, tant d'injustices frappèrent des humains cousus de paradoxes et de contradictions.


Au nom de la Lumière Divine, tant d'augustes et froids palais, dentelés de pierre resplendissante, furent dressés afin de conjurer les Ténèbres du Démon.

Au nom de la Lumière Divine, tant d'austères inquisiteurs chassèrent l'impie, le faux converti, le sorcier, l'hérétique et les diables en eux.


Oui, au nom de la lumière divine, il y eut beaucoup d'errances dressées comme remparts contre le Mal.


Mais le Mal n'est-il point dans les détails ?

Le Mal n'est-il pas aussi pavé de bonnes intentions ?


Si nous nous fiions à l'optique chrétienne, si nous suivions leur logique jusqu'au bout... Les torts faits au nom de cette lumière divine n'ont-ils point projeté une ombre...Maligne ?

À chaque Lumière équivaut une même part de Ténèbres opaques.


Dieu se situe-t-il réellement dans la Lumière éclatante de midi ? Dieu résiderait-il avec joie dans de splendides palais blancs ? Dieu demanderait-il réellement de pourchasser quiconque n'épouserait pas sa façon de voir le monde... en noir et blanc ?


S'Il a créé le monde et l'Homme à son image, et s'il est exact que nous ne sommes que nuances de gris (plus, beaucoup plus que cinquante, ceci dit), Dieu peut-il seulement se draper dans une Lumière éclatante ?


Moi qui vous parle, j'ai un jour rencontré un dieu. Oh, certes, guère un dieu Unique. Un de ces vieux dieux qui attendent de dire leur dernier mot dans le grand ballet mondial. Tout de même, j'ai un jour rencontré un dieu.

Celui-ci se cachait au milieu de stèles grises, avait pour compagnon un chat gris, se drapait dans des haillons gris, portait une barbe grise, et était lui-même un peu gris...




Faut-il avoir peur d'un Dieu qui colore le monde en noir et blanc ? Certainement. Le révérer comme seul et vrai Dieu ? Ceci est un choix personnel.

Néanmoins, vous ne m'ôterez point de la tête l'idée que la véritable valeur des dieux est une valeur de gris...

samedi 28 novembre 2015

365,24 jours plus tard...

[ndTontonGilles : En ce jour anniversaire de ce blog je vous propose, outre un petit bilan, un texte un peu plus léger, un peu moins littéraire et un peu plus direct. Voyez cela comme un dialogue entre le lecteur et votre serviteur.]

Voici déjà la fin de la première année des rêveries de Tonton Poil. Chers lecteurs, êtes-vous heureux ?

Que d'âneries visuelles et écrites avons-nous consenti à lire pour flatter votre égo hypertrophié, monsieur Gilles, tout de même !

Oui, il est vrai qu'au final c'est pas moins de 102 billets (en comptant ce dernier que vous lisez présentement) qui vous auront été infligés sans vergogne ni retenue, mes chers lecteurs.
Oh certes, au fil de cette année j'ai su trouver un rythme de parution régulier, un billet tous les quatre jours environ. Mais parfois je vous plains...

Oui, certes, comme cette fois-ci où vous avez voulu vous faire passer pour un loup-garou,  ou cette série de billets sur les légendes locales avec des neveux qui ne sont pas encore à l'état de projet. Ou encore ce fameux billet où vous vous prétendiez postier sexagénaire, amateur d'un certain journal satirique resté tristement depuis dans les annales.

C'est vrai que je ne manque point d'imagination quand il s'agit de raconter des histoires à dormir debout. Malheureusement, si le personnage du postier sexagénaire était un mythe, j'aurais aimé n'avoir jamais ressenti le besoin d'écrire, ce 7 janvier 2015.
Tout de même, grâce à l'intervention d'un lecteur (qui se reconnaîtra) sur son forum de course à pied préféré, ce funeste billet reste aujourd'hui encore un record de lectures ici-bas.

Moui, c'est à dire qu'il était écrit dans l'émotion du moment et qu'il participait d'un élan républicain général... Qui n'a pas duré. Personnellement j'ai bien aimé vos cinq premiers haïkus.

Il est vrai que les deux billets de cinq haïkus écrits à ce jour sont les deux suivants dans la liste des billets les plus lus. J'avoue que je ne m'attendais pas à un tel succès, même si tout est relatif, évidemment. Je vous remercie, chers lecteurs, pour leur avoir trouvé du charme. Curieusement, le billet concernant le Pont du Père Ubu les rattrape de près.

...Mais dites-moi, que nous préparez-vous pour l'année à suivre ? C'est l'occasion rêvée, non ?

Cela, seuls l'avenir et votre fidélité à ce blog vous apporteront la réponse... Toutefois, cette première année semble être un test concluant, aussi je me vois bien continuer encore, autant que possible, à ce rythme ! Vers l'infini et au-delà !

Nous nous disons donc à l'année prochaine ? Puisse votre blog fêter ses deux ans en Novembre 2016. Vous racontez certes des bêtises à longueur d'année, mais au moins sont-elles écrites dans un français soigné...

Oui, mes chers lecteurs. À l'année prochaine pour de nouvelles âneries écrites et visuelles. "Car rappelez-vous, ce sont des choses qui arrivent !", comme dirait l'autre...

mardi 24 novembre 2015

Le dernier battement...


Dans les ténèbres les plus sombres,
Là où se révèle notre part d'ombre,
Là où le plus profond des désespoirs
Se reflète dans le moindre des miroirs...

Dans ces ténèbres démoniaques
Se cache une parcelle de divinité.
À l'endroit où cesse ma traque
Quelque chose perce l'obscurité.

Un Soleil miniature dans les feuilles ?
Que nenni. Car cette belle couleur
Est celle qui sied aux dieux en deuil.
D'un seul fruit vient cette belle lueur.

Car oui, c'est au cœur des Enfers,
Au plus profond boyau sous terre,
Que se situe l'unique fruit défendu :
Dieu a ici son seul cœur suspendu.

Dernier lien de cette déité avec la vie,
Dernière relique de ce Saint Esprit,
Ses battements sont à présent bien lents.
Un jour très proche, viendra son temps.




La Normandie, si proche du paradis.
La Normandie, si proche de l'enfer.
Ici, où les péchés viennent se défaire.
Là, où la chaleur de Dieu s'est refroidie

Dans ces lieux touchés par la Grâce,
Apparaît la Victoire de Samothrace.
Dans ces lieux maudits par les démons,
Se tient le vaste trône de Mammon.

Et juste ici, sous mes si jeunes yeux,
La preuve qu'à présent démons et dieux
Ont conquis la terre de mes ancêtres,
Terre de pommiers, de chênes et hêtres.

Ô Normandie, tu es vraiment bénie...
Ô Normandie, nous sommes maudits...

Car... Parmi les ombres de ce théâtre,
De ce dieu le cœur a cessé de battre.

vendredi 20 novembre 2015

Pour qui sont ces sifflements qui serpentent sur ce blog ?


Quelques centaines de signes, syllabes et silences sous-entendus, ceci est ma recette pour synthétiser cent récits, versifiés ou de simples histoires, à peine des "short stories" comme le susurrent les anglo-saxons.
Saurais-je suspendre votre attention encore un instant à suivre mes incessants sifflements ? Juste plus de six secondes ? Serez-vous fascinés par cette signalisation en S, suspendue au-dessus de cet essai tout en assonances ? Suis-je stupide ! Il s'agit d'allitérations...
Nous ne sommes hélas pas au moment astrologique de la constellation du serpentaire, que je sache.
Cependant, je savoure cet exercice certainement difficile; c'est en ce jour mon centième "post", comme le skypent les jeunes de ma génération, quand ils s'amusent sur internet : réseaux sociaux depuis six ans, skyblogs jadis... Nous "postons" en effet pour la postérité, nous laissons une trace de nous sur le Réseau depuis notre adolescence. Nos rédactions ici, dans cet espace sans limites, nous disons d'elles qu'elles sont "nos posts". Nos parents, sexagénaires, s'adressaient des lettres entre deux absences. Conservaient leurs missives sentimentales dans de discrets coffres à secrets.
Hélas, les secrets sur papier s'abîment, pâlissent, voire s'effacent.
Certes, dans cet espace international d'interconnexions, des centaines, et plus, de centaines de milliards de signes binaires s'égarent, se font doucement oublier jusqu'à la disparition des index de Lycos et Altavista...
Excusez-moi, c'est une vaste plaisanterie de diplodocus : personne ne les considère sérieusement comme des sites de recherche décents... Il est certain aussi que Google ne sonne pas de la façon qui me siérait.

Est-ce possible ? Vous me suivez toujours ? Alors soit, je vous remercie de votre extrême mansuétude.
En récompense du sacrifice de votre patience, voici la réponse à la grande question : d'où me suis-je sauvé ? Dans quel asile de cinglés s'est installé un tel obsessionnel de l'allitération en S ?


Dans ce sacré Soleil, duquel je suis descendu. Exactement, tout comme Racine.

Pardonnez mon espièglerie. C'était nécessaire pour ce numéro cent... Ne pas essayer risquait de me rendre psycho...

lundi 16 novembre 2015

Au-delà des palais de la Réalité...


[ndTontonGilles : J'ai hésité à laisser paraître ce billet comme prévu ce 16 Novembre, compte tenu des événements de vendredi dernier. Mais après mûre réflexion, je pense que les circonstances réclament justement de rêver, rêver plus et rêver notamment de bienveillance... En ces jours troublés, revendiquer la bonté, sinon comme une force naturelle, au moins comme le seul espoir d'un avenir heureux... est probablement l'acte politique le plus sage -et le plus subversif- qui soit. Aussi je vous souhaite de bonnes rêveries sur ce blog...]


Les licornes existent. Je leur ai parlé.

C'était un après-midi de Novembre, un de ces après-midi courants à cette période de l'année; brumeux, gris, voire monochromatique.

Nous nous promenions dans la rue Wilson, à Alençon, mon père et moi, en vue de nous rendre à la Librairie du Passage, en centre-ville, commerce bien connu et pour ainsi dire la seule librairie viable des alentours. Soudain, un détail attira notre attention.

Une tête de licorne, encastrée dans le bas d'une façade de maison.
Détail cocasse, voire amusant. Pourtant, quelque chose dans le regard de cette décoration d'un autre âge m'interpelait.
Car en effet, d'où venait-elle ? Autour de nous personne ne semblait la voir, malgré le passage régulier des badauds.
Je crus bon de marmonner quelques paroles sacrées en Quenya, par prudence, mais... rien.

Supposant qu'il n'y avait donc aucun danger, que ceci était juste un de ces détails incongrus dans les vieilles villes, je m'approchai, mis mon reflex préféré sous tension, fis quelques réglages et appuyai sur le déclencheur...

Soudain, j'eus un voile noir et, tandis que ma conscience revenait, je m'égarai hors de la pensée et du temps. Les étoiles tournaient autour de moi, et chaque jour était aussi long qu'une existence sur la Terre. Mais il n'était pas temps pour moi de quitter ce plan hors de la réalité. Je fus projeté devant une présence, une présence en forme de licorne, et cette licorne était invisible, mais sa présence m'apparaissait comme rose.

Elle me fixa de ses yeux roses et invisibles et commença une très longue discussion entre nos deux esprits sur notre monde, ses origines, son Histoire, sa fin prochaine. J'étais à la fois terrifié et émerveillé. Terrifié car je percevais en une fraction de seconde toute la violence, toute la souffrance, toute la colère, toute la cupidité de notre espèce humaine, mais aussi émerveillé, car cette présence invisible de licorne rose me procurait un sentiment de félicité totale, et je sus alors que cette dernière ne nous abandonnerait pas, quoi que nous fassions.

Timidement je tentai d'approcher ma main vers "Elle", mais au moment où mes doigts frôlèrent son invisible crinière, je fus à nouveau empli d'un total voile noir.

Au loin, dans le noir, quelqu'un m'appelait.

J'ouvris les yeux.
Mon père se tenait au-dessus de moi. Il semblait passablement inquiet. Je lui souris... sourire qu'il me rendit.
Je me redressai lentement, un peu engourdi.




Que s'est-il passé, papa ?

Ben, tu as basculé en arrière en prenant une photo et tu as heurté le sol. Ça a fait un bruit terrible.
Tu... tu es sûr que ça va ? Tu as eu de la chance, tu n'es resté assommé que quelques secondes !


Oui... oui, ça va même très bien ! Je suis juste un peu fatigué... Cela te dérange-t-il si on abrège notre promenade ?

Tu ne veux pas qu'on aille aux urgences ? Ce serait plus prudent...

Non... Non. Je sens que rien n'est abîmé, et je n'ai même pas mal au crâne. Le sac de mon appareil aura amorti le choc de ma tête.

...Très bien, rentrons. Mais tu me tiens au courant ce soir si jamais... ?

Ne t'en fais pas, je te tiendrai au courant.



Alors que le soleil de 17h commençait à se coucher, je levai les yeux vers le lointain et murmurai...

Il est sage de voir la vie en rose quand nous ne sommes pas seuls...

Que veux-tu dire par là, Gilles ?


Rien... Rien de rationnel. Tu ne comprendrais pas... Je ne suis moi-même pas sûr de comprendre. C'est...Comme une présence invisible qui serait de couleur rose. Comme quelque chose que nous ne sommes pas faits pour comprendre.

Moi, je dis que tu t'es cogné la tête trop fort...

jeudi 12 novembre 2015

62, place Bonet...


- Commissaire ! Commissaire ! Excusez-moi, j'ai dû porter ma fille à l'école et... C'est le vélo de Julie Découvien ?

- Sans doute, lieutenant. Les plongeurs l'ont retrouvé il y a une heure. Il a séjourné un long moment sous l'eau, mais on a retrouvé sa besace de cuir avec sa carte d'identité, pas très loin de la carcasse...
Bon dieu, je ne sais pas ce qui va être le pire. Annoncer à la famille Découvien que leur fille est toujours introuvable ou leur annoncer qu'elle a été probablement victime d'un de ces tordus qui rôdent la nuit.

- Retour à la case départ, donc ?

- Oui, lieutenant Levallois. Retour à la case départ. Quand je pense qu'en un an, on a passé plus de temps à fouiller Champfrémont et ses alentours, à faire des battues, à interroger les voisins, qu'à trouver la moindre piste sérieuse... Et maintenant ça. Honnêtement, on aurait dû clore le dossier depuis longtemps. Mais que voulez-vous...

- Il y a toujours un espoir... Ce vélo nous révélera peut-être quelque chose... Et la besace aussi. On retrouvera le coupable. On sait maintenant que Julie s'est rendue à Alençon dans la nuit du 30 septembre 2014. Peut-être quelqu'un l'aura-t-il vue ?

- Mon pauvre Levallois. On remarque que c'est votre première affaire d'importance... Je vais vous dire comment ça va se passer, moi. Dès que les pigistes de l'Orne Hebdo et d'Ouest France auront eu vent de l'information et l'auront rapportée, il va y avoir une centaine de témoignages par jour à trier, et aucun de valable. Dans un an, on y sera encore.

- Vous êtes un peu défaitiste, là, commissaire...

- Défaitiste ? Non, je connais juste très bien cette ville. Passé minuit, il n'y a déjà plus grand monde à circuler sur les bords de Sarthe. Non, m'est avis qu'on retrouvera le corps de Julie à l'occasion de travaux. Le légiste conclura à un homicide, mais ne donnera pas d'informations susceptibles d'aider au vu de l'état dans lequel on le retrouvera.

- C'est bien ce que je disais, vous êtes défaitistes...

- Et vous, vous avez trop abusé des séries policières dans votre adolescence, Levallois ! En pratique, ce genre d'affaire est presque toujours classé sans suite. Pas de traces, pas de témoins. Et ça fait plus d'un an maintenant. Si on retrouve le coupable malgré tout, je vous offre le champagne et...



- Commissaire Delavenue ! Un mot sur ce que vous venez faire ici ? Le public a le droit de savoir ! Juste deux mots, venez !




- Vous voyez, Levallois, si un jour vous passez par l'école des commissaires, vous aurez l'immense plaisir de palabrer en bombant le torse sur l'avancée de vos enquêtes. Mais en attendant, vous allez me faire plaisir de clore ce dossier, fissa fissa.

- Mais... Et la famille ? Ils vont faire comment ?

- Écoutez, si vous avez une boule de cristal, c'est le moment de l'utiliser, lieutenant. Fermez le dossier et passez à autre chose ! Plus vous donnerez d'espoir à la famille Découvien, plus vous les ferez souffrir. C'est fini, vous comprenez ? Fini !

- ... À vos ordres, commissaire.



[ndTonton Gilles : Bien évidemment, cette histoire est purement fictive, les noms également. Ainsi toute correspondance avec des personnes ou faits réels est fortuite et en tout cas involontaire, etc, etc... Ceci était mon expérience de style polar.]

dimanche 8 novembre 2015

Le délicat Point de l'Araignée...



Une jeune épeire tissait sa toile
Au chaud, sur un vieux bout de voile.
Mangeant des moucherons égarés,
Promptement dans ses rets capturés.

La jeune Marthe, reine de ces murs
Y puisa l'idée d'un nouveau point.
De tous, le plus raffiné, le plus pur.
Rapidement, l'on venait de très loin
Pour admirer et acheter cette beauté,
Cette dentelle des gens distingués.

Dentelle des reines, reine des dentelles.
Hélas méconnue, pourtant des plus belles.

Mais qui se souvient du lourd secret
De Marthe, spoliatrice de l'araignée ?
La jeune épeire bientôt finit sa vie.
Marthe ne l'emporta pas au Paradis.





Car le savoir-faire de l'araignée
Jamais ne put être manié
Ni avec la même dextérité,
Ni avec la même complexité.

Les filles de l'épeire diadème
Héritèrent de son talent unique,
Cadeau d'une divinité biblique,
Dépassant feue leur mère même !

Tissant leurs dentelles hors de vue,
Tandis que les voleurs, toute honte bue,
Se rengorgeaient d'un savoir volé
Autour d'une fallue et d’œufs mollets.

Depuis cette honteuse spoliation,
Entre deux grandes expositions,
Derrière des tableaux de maître,
Entre deux poutres de vieux hêtre,

Se pratique dans le plus grand secret
L'art raffiné du Point de l'Araignée.

Mais plus jamais nous ne le verrons.
Les épeires prestement le détruiront,
Trahies par les nôtres qui les volions,
Qui les détruisions, qui les spolions.

Toutes Bénies par Dieu lui-même,
Portent en souvenir de cette histoire,
Délicatement tracé sur leur abdomen...

Un magnifique diadème.

mercredi 4 novembre 2015

La forêt ne nous aime pas !


Qu'on se le dise : la forêt, c'est très surfait. Surtout en automne.
D'abord, les forêts poussent rarement sur des terrains bien plats, bien nivelés. Non seulement elles ont le culot incroyable de forcer l'honnête promeneur à -horreur !- affronter des pentes parfois traîtresses, caillouteuses, non seulement les arbres eux-mêmes s'en mêlent et vont jusqu'à jouer à crocher le pied du badaud égaré en ces lieux hostiles à l'Homme, mais en plus !, oui en plus les forêts sont des endroits très humides.
Comprenez donc qu'été comme hiver, vous  y trouverez toujours une flaque, un ruisseau voire un marais qui n'attend que la première occasion venue pour salir votre magnifique pantalon acheté avec l'argent de votre dur labeur, vos belles chaussures italiennes et vos chaussettes de soie !

Tout de même, cher lecteur : s'il est impossible d'arpenter la forêt en tenue de ville, quelle suite d'avanies peut encore nous attendre ? La peste ? Le choléra ?

Eh bien, presque. Car la forêt est le lieu de résidences de créatures charmantes, comme l'aimable frelon, la sympathique tique (il n'y a pas d'écho), le chaleureux moustique, la délicate vipère et même le plus bel ami des promeneurs : le si courtois essaim de plombs de chasse.

Et vous pouvez toujours espérer vous rattraper sur la flore locale, vous en serez à vos frais ! Les amanites phalloïdes, amatrices de cuisson douces dans votre poêle, les ronces, câlinant délicatement la chair de vos mollets, les glands qui cherchent à vous fracasser le crâne, nos amis à tous les houx et leurs complices les magnifiques orties de bas-côté... Toute, oui toute la flore voudra elle aussi votre mort. Lente et douloureuse, si tant est que ce soit possible.

N'oublions évidemment pas le pire fléau du randonneur forestier : le classieux chauffard des sentiers et des chemins, qui nous prouve de plus qu'il n'est même pas besoin pour la forêt de déployer toute son énergie à nous emm...à nous ennuyer. L'être humain fait très bien lui-même le travail de Dame Nature quand il s'agit de malfaisance.




Aussi, évidemment, quand par miracle, vous tombez sur un chemin inoccupé par quelque force murphyique que ce soit, que le silence s'installe et que les arbres alentour révèlent leur magnifique panoplie de couleurs, paradant pour la dernière fois avant le prochain printemps...

...Il faut en profiter !

dimanche 1 novembre 2015

mercredi 28 octobre 2015

Petit addendum à retardement...

Alençon, le 25 Octobre 2015

(Non, je ne publie pas le jour même.)
Dans un (pas tellement) ancien billet, j'aimais évoquer le caractère unique de la ville d'Alençon, entre eau et verdure.

Je n'aime pas revenir sur mes billets. Ni pour remanier mes textes ni pour changer la moindre image.
C'est pourquoi je vous invite à relire exceptionnellement le billet "De vert et d'eau" après avoir contemplé tout votre saoul cette photo ci-dessus.

Mais j'ai aussi un petit addendum à ajouter ici, une peur à partager :

Ce que j'ai écrit sur cette ville, je le réécrirais sans hésiter, même les quelques griefs que je porte à son égard. Car bien qu'aimant profondément Alençon, je n'oublie pas combien elle a pu être délaissée au profit de quelques égos carriéristes... Ou simplement délaissée comme on délaisse un vieux jouet qui n'apporte finalement plus satisfaction avant d'être enfoui dans le carton de l'indifférence, si je puis oser une métaphore digne d'un poète du déménagement.

Je me suis toujours beaucoup plu à Alençon. J'y réside depuis aussi loin que mes souvenirs portent - et ils portent très loin.
Mais au fil des années, j'ai vu tous mes amis, tous mes cousins, toutes mes cousines.... des familles entières même, quitter Alençon.
Parce que cette ville ne propose pas (ou si peu) d'avenir pour ceux qu'on appelle "jeunes".


Pourtant, à relire ce billet dont je vous parle plus haut, la situation paraît tellement plus idyllique. En tout cas presque souhaitable.
Car c'est un fait, j'aime Alençon. Du fond du cœur.
Et c'est parce que j'aime cette petite ville, à taille humaine, que je suis inquiet pour son avenir. Que je crains chaque jour davantage pour son avenir.

Si Alençon peut encore être un endroit où il fait bon vivre, il faudrait cependant ne pas trop rêvasser. Moi qui rêve chaque jour que Dieu et Diable font, comprenez que cela me coûte d'avancer ceci.
Alençon a perdu ses jeunes. Elle a perdu un semblant d'attrait pour ces derniers. Ils ne veulent presque jamais faire leur vie ici.
Qu'arrivera-t-il quand les autres auront passé de vie à trépas ? Que restera-t-il ?

samedi 24 octobre 2015

Un petit Sijo, filant comme les étoiles de la nuit, libéré du ballet cosmique...




Je te rêve pâle et blanche, spectre des nuits. Où te trouves-tu ?
Au milieu d'étoiles dansantes, en de très grandes constellations.
Elle est là, derrière l'horizon. Au loin, elle dort, dans son lit.

mardi 20 octobre 2015

Niké...


Tonton ! Tu m'as jamais dit c'était quoi cette statue en haut du rond-point, là !
Ah, tu veux parler du monument aux morts ? C'est un ensemble de monuments aux morts des deux guerres mondiales. Cette statue en haut est en fait, pour faire simple, la poignée du glaive géant que tu vois planté dans le sol, au milieu du rond-point.
Difficile de l'identifier précisément; il existe finalement peu de sources sur sa signification. Tout au plus sait-on qu'il s'agit d'une allégorie de la France unie en une seule Nation défendant la Patrie.
Mais elle ressemble aussi à Niké, la déesse grecque de la Victoire : ailée, avec un bouclier. Néanmoins je n'arrive toujours pas à identifier clairement ce que tient ce personnage dans la main droite. De face, on dirait une sorte de kriss, un couteau cérémoniel, et ça, ce n'est pas cohérent. Niké est généralement représentée tenant une couronne de lauriers.
Mais bref, il s'agit peut-être simplement d'une sorte d'allégorie du peuple français après tout, et pas forcément une grande référence culturelle antique...
Attends, tonton, je comprends rien ! Niké c'est quoi comme déesse ? Et puis c'est pas un ange, la dame en haut du pilier ?
Niké, tu devrais savoir ce que c'est, mon petit garnement. Je croyais que tu regardais tous les dimanche matin les DVD des Chevaliers du Zodiaque de ton père ? Tu ne vois pas qui est Athéna-Niké ?  Athéna est la déesse grecque de la guerre, et elle est souvent liée à Niké, la déesse grecque de la victoire. Ici nous avons une statue qui ressemble à Niké. J'imagine qu'elle est censée glorifier la victoire française contre les allemands.
Pourquoi tu dis ça, tonton ? C'est pas ce qui s'est passé ?
Si, mon petit. Mais vois-tu, j'ai du mal avec ce monument aux morts. Il aurait dû maudire la guerre, rendre un hommage funèbre à la tragédie humaine qu'elle représente pour chaque peuple qui y est confronté. Ç’aurait été plus... humain.
J'ai envie de croire que cette statue n'est pas une statue personnifiant la Victoire, car il n'y a rien eu, dans ces deux guerres mondiales, de glorieux. Ni à Alençon, ni ailleurs.
Le patriotisme, le nationalisme deviennent très vite des poisons pour l'esprit. Il me paraît tout à fait bon d'aimer son pays... Tant qu'on n'en vient pas à s'aveugler sur ses torts, défauts et sur le sang que nous avons sur les mains.
La France et l'Allemagne sont en paix l'une avec l'autre depuis plus de 70 ans maintenant, et avec elles, toute l'Europe de l'Ouest. À ton avis, mon cher neveu, avons-nous vraiment besoin d'un tel monument à la gloire de la victoire guerrière et de la défense de la Patrie ? Un glaive peut-il symboliser la paix et l'hommage aux victimes de l'Histoire ?


Allez, viens donc. On n'est plus très loin de chez ton Papy et ta Mamie. Ta sœur et ton frère doivent être arrivés maintenant.
Tu es bien triste, tonton... Ça va ?
Ce n'est rien. C'est simplement... Le poids de l'Histoire.
Ça veut dire quoi ?
...Simplement que ton oncle se fait vieux, petit à petit. Allez, viens...

vendredi 16 octobre 2015

Songes et souvenirs...

Dans la froide grisaille d'Octobre, derrière une haie en bordure de route se tenait un arbre mort.
Ses étranges ramifications instillaient la peur et le doute dans le cœur de ceux qui se rendaient sous ses branches, car en effet, cet arbre était connu pour avoir jadis été le lieu de suicide de plusieurs personnes, acculées par des dettes, détruites par une tromperie ou simplement gravement malades.
Or, depuis approximativement dix ans, plus rien. L'arbre qui, jadis, était un haut lieu du suicide local, semblait agir en repoussoir envers les suicidaires. L'on vit même des personnes désespérées se reprendre dans un sursaut d'instinct de survie et appeler sur place le SAMU.
Bien évidemment, et comme souvent, personne ne sut ce qui pouvait bien avoir provoqué un tel changement sociologique chez les suicidaires du cru.
La réponse était pourtant sous leurs yeux, accessible à toute personne un peu observatrice et néanmoins présente sur ce cliché.
Deux oiseaux. Des corneilles ou des choucas des tours ? Certes guère, messires.
Seule une espèce d'oiseau pouvait à la fois avoir un impact si considérable sur les humains et être insensible à mon fidèle appareil photo qui pourtant avait brisé plus d'un sortilège...
Des corbeaux.
Et à dire vrai je ne vous ai point livré toute l'étendue de mon expertise sur la question. Car même les corbeaux craignent le regard de la vérité à travers mon téléobjectif, bien qu'ils soient de plus sérieux concurrents que les simples rouges-gorges.
Ces deux corbeaux ont un nom. Un nom fameux. Le premier est Hugin et le second, Munin. L'un est la pensée et l'autre la mémoire du dieu Odin. Car je vous le rappelle, en terres normandes, les vieux dieux ne sont pas encore morts...
On pourrait répugner à cette hypothèse, mais en vérité c'est bien plus qu'une hypothèse. Souvenez-vous cette curieuse histoire que je vous ai racontée il y a quatre jours à peine... Cette histoire se passe à peine à quelques dizaines de mètres de ce fameux arbre. Hasard, coïncidence ?

Jadis, il se murmurait que Hangadróttinn accordait, au pied de cet arbre, un dernier présent à ceux qui se préparaient à accélérer l'inéluctable : tantôt la lucidité, tantôt de simples souvenirs.
Mais c'était il y a longtemps... Bien avant les jours de la chrétienté triomphante, bien avant qu'il n'existe plus que quelques individus acceptant de croire en Odin, comme l'on croirait dans les forces d'un vieil ami.

Cependant, la nature s'est éveillée, particulièrement aux aguets, depuis une dizaine d'années. Hasard ou revanche récente des vieux dieux, ceci semble avoir revigoré le panthéon des Ases et, depuis, moi-même ai pu le constater...

...La sorcellerie semble renaître.

lundi 12 octobre 2015

Les cimetières sont de curieux endroits...

Il est un lieu dont je vous ai déjà brièvement parlé que j'affectionne particulièrement pour son calme et même sa grande tranquillité : le cimetière.
Lieux de repos des morts depuis toujours, les cimetières sont également pour moi des lieux fortement symboliques, un lien étroit entre un passé nébuleux et permanent et un présent fugace et chaotique.
Ainsi, j'ai parfois la curieuse habitude de me promener en compagnie de mon père dans un des cimetières de la commune. Des cimetières dans les environs, il y en a un nombre assez appréciable pour une agglomération au final relativement modeste.
On y trouve toute l'histoire de la ville, des notables aux miséreux. Bien sûr ces derniers ont les monuments funéraires les plus périssables et les moins bien entretenus, bien qu'à ce sujet les monuments funéraires des familles nobles des environs valent eux aussi le détour question vétusté.

Or donc, mon père et moi arpentions les allées les moins bien entretenues d'un de ces cimetières, des allées où des noms illustres de généraux napoléoniens côtoyaient ceux d'anciennes grenouilles de bénitier... Quand nous fûmes interrompus par un bruit.
Non, pas un bruit. Un miaulement.
Intrigués nous cherchâmes du regard la bête responsable et celle-ci se dévoila effectivement à nous, surgissant de derrière une stèle.
Ce matou avait les yeux dorés et le pelage gris et blanc.
Continuant de miauler vers nous, il accourut et se frotta dans un premier temps à mes jambes, puis, dans un second temps, à celles de mon paternel avant de revenir vers moi.

Amusés, nous nous demandions tout de même combien de puces nous allions emporter dans nos demeures respectives, mais n'eûmes pas beaucoup l'occasion de nous attarder sur cette angoissante question car soudain...

Gami ! Viens ici !

Nous nous retournâmes derechef et tombâmes nez à nez avec un vieil homme à l'apparente incurie. Habillé dans de vieux haillons dont un manteau gris délabré l'enveloppant tant bien que mal, il s'appuyait sur une canne, peut-être la seule chose présentable qu'il possédait. Il portait à la taille une besace de cuir ayant très mal vieilli, au cou, mal cachée derrière sa barbe grise, une écharpe d'un bleu aussi délavé que la sorte de chapeau mou qui coiffait ses trop rares cheveux grisonnants. Cependant ses yeux étaient... non, il n'avait qu'un œil ; d'un bleu perçant, presque plus saisissant qu'un bleu laser, il nous scruta tour à tour mon père et moi, et alors que mon père commençait à bégayer quelques excuses à l'adresse de cette personne qui était vraisemblablement un vieux SDF, celui-ci nous parla :

Ne vous en faites pas mon brave monsieur. Mon petit félin Gami a tendance à aimer les odeurs. Je crois d'ailleurs que ce jeune monsieur possède un chat lui aussi, vu la frénésie avec laquelle mon petit Gami se frotte à sa jambe, - Gami ça suffit ! - mais permettez moi de me présenter : je m'appelle Bruno. Et messieurs, je crois savoir que vous, vous êtes monsieur l'instituteur de l'école de Lancrel. Oui, je vois qui vous êtes, monsieur. Ah oui, je crois savoir que vous n'enseignez plus. Oh, que je vous envie, monsieur. Vous vivez actuellement les plus belles années de votre vie, - sauf votre respect, car je le sais aussi bien que vous, l'âge est un fardeau parfois lourd à porter, oui... - et vous jeune monsieur. Vous, je vous connais très bien. Vous êtes monsieur Gilles, celui que d'aucuns confondent tantôt avec un journaliste de Ouest-France, tantôt avec un photographe professionnel. Oh vous savez, les bruits vont vite en ville, et j'entends de nombreuses choses en traînant dans les rues.
Oui, vous non plus n'avez finalement pas à vous plaindre. Malgré les soucis qui, je le vois, ont marqué votre visage - et votre regard - je vous le dis : vous vivez de beaux jours... La jeunesse est un âge qu'on a trop tort de gâcher avec ses angoisses.

Interloqués, et visiblement très mal à l'aise, nous n'osions dire mot à ce Bruno qui semblait tout compte fait être plus énigmatique qu'un simple clochard, bien que sa loquacité, je le voyais bien, contrariait fort mon père qui, d'habitude, était celui que personne n'arrêtait une fois lancé dans une discussion quelconque. Le voir marri de n'être point celui qui sait me chagrinait quelque peu, en plus de rajouter à mon malaise. Nous ne pensions pas à quel point la rue pouvait colporter des informations personnelles voire intimes sur les gens et comment de simples malheureux pouvaient se retrouver à en savoir plus sur les gens que la DCRI elle-même.

Ah mes bons messieurs, cela me réjouit de rencontrer dans cet aimable cimetière deux âmes aussi nobles et aimables que vous, car sachez-le, mon petit Gami - Shinigami, c'est son nom complet - a un jugement très fiable sur les gens. S'il vient vers vous, c'est que vous êtes des personnes de bien. J'irai même plus loin en affirmant que, vu son amour, vous êtes de la race des gens appelés à faire de grandes choses... Mais, messieurs, vous le savez aussi bien que moi, les grandes personnes qui firent des grandes choses connaissent parfois de tragiques destinées. Vos vies à tous deux ont sûrement déjà connu des choses terribles... Vous savez, messieurs, j'ai quelque pouvoir de prescience que je tiens de mon grand-père, qui lui-même le tenait de son grand-père. C'est un don, que voulez-vous...
Rassurez-vous, monsieur le vénérable instituteur... Je ne cherche point à vous quémander de l'argent. D'ailleurs je vais faire mieux que ça. Je vais vous dire ce que j'entrevois pour vous. Aussi vrai que je n'ai qu'un œil, je tiens pour vrai ce que je m'apprête à vous dire.




Désolé, monsieur...euh monsieur Bruno mais nous ne sommes nullement intéressés... Vous...Vous savez nous ne croyons pas à ces pouvoirs magiques. Nous avons l'incorrigible défaut d'être des rationalistes et des matérialistes complets. V...Viens Gilles, nous avons encore à faire ce soir...

Je n'en crus pas mes oreilles un instant et n'eus d'ailleurs pas le temps de saisir toute la portée cachée du discours de ce sieur Bruno, mais déjà mon père m'entraînait manu-militari, courant presque, hors du cimetière.

Je n'eus qu'un dernier regard à la porte du cimetière. Bruno était toujours planté là, à l'endroit où nous l'avions laissé. Il nous regardait et les deux yeux dorés de son chat nous fixaient aussi.

Ma dernière image de ce vieil homme trouble fut deux corbeaux qui se perchaient chacun sur une de ses épaules en croassant.

Puis je filai à la suite de mon père...


Loin de notre portée, Bruno murmura :

Nous nous reverrons, messieurs... Nous nous reverrons.









Les cimetières sont de curieux endroits, les gens qui les fréquentent sont de curieuses personnes, et parfois l'on peut y faire des rencontres étranges...

...Mais rien ne pouvait nous préparer à la rencontre de Bruno.

jeudi 8 octobre 2015

Ombres et poussières...



Cyclone infernal.
Jadis, des champs en jachère.
Poussières et cendres.

Un Cri retentit au loin.
Sakuya-Hime s'agite.


dimanche 4 octobre 2015

Au bord du monde...


Au bord du monde, voici l'abîme !
Au bord du monde, voici les cimes !
De roche, de bois, d'air et d'eau,
Ces géants me portent sur leur dos.

Sous mes pieds, un grand précipice !
Sous mes pieds, le temps du sacrifice !
Ici le sang séché s'insinue sous la roche.
Là, un crâne et un vieux casque boche...

Car la forêt donne et reprend à tous.
Car la forêt toujours grandit et pousse.
Sans relâche, elle nous nourrit.
Sans relâche, elle nous détruit.

Tous nos sacrifices sont vains.
Tous nos espoirs, balayés au loin.
Ne reste que la nature féconde,
Qui prend racine au bord du monde...

jeudi 1 octobre 2015

La légende du cavalier noir de Sai...

Dis tonton, c'est vrai que tu nous emmènes vers un endroit hanté ? C'est ce que maman nous a dit, mais elle a pas dit qu'on allait à Argentan.
Eh bien oui, mes chers neveux, je vous emmène bien vers un endroit hanté... Peut-être même vers un endroit maudit !
Argentan est maudite ? C'est vrai ?
Non, mon petit neveu. Nous n'allons pas exactement à Argentan mais sur les chemins de Sai.
Sai ? C'est un drôle de nom. Tu nous racontes l'histoire du fantôme d'ici ?
J'y compte bien. D'ailleurs nous sommes arrivés. Descendez de voiture, je vais vous la raconter...

Sachez-le, il existe de nombreuses rumeurs autour de ce village de Sai. Notamment des histoires de garous, des histoires d'autant plus intéressantes, qu'elles font partie des histoires originelles de loups-garous, de ces hommes qui, portant une haire, devenaient de dangereux tueurs affamés de chair crue.
Oui, mes petits... Sai est un de ces villages où de puissantes forces occultes se sont rassemblées de tous temps... Un de ces villages qui flirtent avec aussi bien l'enfer que le paradis...

... Et en parlant d'enfer, il existe une curieuse légende ayant terrorisé des générations de locaux.
Car en effet, sur les chemins qui mènent à Sai, certains anciens attestent que, certaines nuits, où la Lune n'est masquée par aucun nuage, un grand, jeune et séduisant cavalier montant un cheval noir parcourt les chemins des environs, semblant perdu.
Gare à celui qui, tardivement, croiserait sa route... Car ce bel homme demande son chemin à qui il croise, invitant même à monter en croupe pour l'aider à retrouver son chemin vers la cité d'Alençon.
Ceux et celles qui montèrent ce noir destrier ne revinrent que morts, près du pré de la fontaine, horriblement mutilés, les yeux balafrés et le cœur arraché.

On raconte qu'une jeune habitante de Sai eut la vie sauve en se laissant tomber du cheval noir à l'insu du cavalier et en se cachant prestement dans un buisson. D'après cette pucelle réputée être d'une grande piété et donc peu sujette à l'affabulation et au mensonge, elle reconnut la véritable nature du cavalier par ses pieds fourchus.
L'on dit que la foi de la jeune pucelle lui indiqua le buisson pouvant la protéger du Démon. C'était une ronce commune qu'elle raconte avoir vu briller de mille feux quelques instants avant de s'y dissimuler.

Depuis des siècles résonnent certaines nuits les pas d'un cheval, au loin, sur ces chemins.
C'est pourquoi, mes chers neveux, il est déconseillé de parcourir les routes où nous sommes, depuis la tombée du jour jusqu'au petit matin... Il y a eu trop de jeunes esprits naïfs emportés par le Diable...

D'ailleurs, écoutez... N'entendez-vous pas le bruit des sabots d'un cheval au loin ?

Mais tonton ! C'est pas drôle ! Tu fais peur...

lundi 28 septembre 2015

L'ombre est sur vous ! La fin a sonné...



Le temps est écoulé, enfants de Hùrin...
Le vent rapporte le vacarme des combats.
Les figures des Valar ont été mises à bas.
Un faux héros se lève, son nom est Draugluin.

Attendrez-vous que vienne votre frère Tùrin ?
Regardez dans ce puits, il vous attend en contrebas !
Regardez ici, le voici qui danse avec Melkor le sabbat !
Le rejoindrez-vous dans ses folies luciférines ?

Voyez ! Les ténèbres s'avancent ! Yavanna recule !
Voyez ! Morgoth s'approche ! L'équilibre bascule !
Sauverez-vous ce qui peut être sauvé ?

Vos royaumes humains sont en très grand péril !
Bientôt s'éteindra la lueur du dernier Silmaril !
Agissez ! Avant que votre temps ne soit achevé !

jeudi 24 septembre 2015

La légende du Croquemitaines...

Il y a très longtemps, à une époque si lointaine que même votre grand-père n'était pas né, dans ce beau pays de France, vivaient des monstres terribles.
Affamés insatiables de chair tendre qu'ils assaisonnaient de diverses épices, ces monstres vivaient sous l'Astre Maudit, alors que tous les gentils enfants dormaient.
Régulièrement, notre peuple trouvait ses ouvriers, ses chasseurs, ses femmes, et même ses enfants brûlés au troisième degré. Morts. C'était alors une terrible époque pour nous autres à ce qu'on en dit, mes chers neveux... Car ces monstres vouaient une haine féroce à notre peuple Glog.
Leur haine allait croissant de jour en jour à l'aube du XXIe siècle, jusqu'à incendier des forêts entières où, de réputation, nous nous trouvions. Certains eurent même peur de la simple aubépine qui donna notre nom. Peurs de primitifs à peine civilisés.
Un jour, notre Grand Roi Mihnea Ier eut assez de nos persécutions incessantes et totales.

La guerre démarra.

Il y eut de nombreuses batailles. Et chaque bataille engendrait de nouvelles tristesses, de nouvelles persécutions. Jusqu'au jour où notre héros national, Gabriel Belmont, fit cesser une fois pour toutes cette mascarade. À lui seul, mes enfants... À lui seul, il repoussa les armées d'Europe, toutes liguées contre nous, nous rassembla et nous mena à la victoire.
Nous aurions pu croire que le peuple Franc allait accepter sa reddition, mais il apparut bien vite que, malgré leur défaite cuisante en 2109, aucun d'eux n'allait cesser le combat.
C'est ainsi qu'au cours des siècles suivants, le peuple Franc survécut encore difficilement dans les clairières les plus isolées qu'il avait tenté de brûler jadis et, inlassablement, guerroyait contre notre peuple. Nous leur fîmes une traque constante, cherchant toujours à préserver la paix dans le pays et essayant de négocier avec les plus modérés d'eux. Rien n'y faisait. Au début du XXIVe siècle, il ne restait plus que deux communautés de Francs sur ces terres. Les anciens Wisigoths, Ostrogoths, Latins et Slaves étaient eux aussi en pleine déconfiture. Ces peuples étaient pour ainsi dire finis.
À présent, moi qui vous parle, mes chers neveux, il ne reste plus de Francs sur ces terres...

... Plus aucun, à part celui que l'on nomme "le Croquemitaines". Je sais que vous avez déjà entendu cette histoire. Oh, guère plus qu'un homme sur le déclin diront les sages. Guère une menace.
Mais il est là, quelque part sur les terres des Normands...


On dit que, les quelques jours suivant le premier Septembre, il parcourt encore et toujours les voies de fer que son peuple avait jadis bâties... Et ces jours-là, il ne fait pas bon être assoupi, car quiconque n'aurait pas accroché une branche d'échalote à son cercueil ne verrait pas la prochaine Lune se lever...

Ses pieux sont faits d'os de Glog, sa boisson est une eau maudite par le Père Solaire lui-même, sa nourriture est faite d'animaux brûlés vifs et l'Astre Maudit brille toujours sur son chemin...


Méfiez-vous, mes chers neveux... Méfiez-vous du Croquemitaines...

dimanche 20 septembre 2015

Vi veri universum vivus vici...

Bien qu'ayant glosé à outrance sur l'absurdité et l'attitude quelque peu néocolonialiste derrière la présence de certains bouddhas se retrouvant jusque chez cette mienne mère-grand collectionneuse de bibelots devant l’Éternel (souvenez-vous, c'était il y a peu.), avec également un zeste de mauvaise foi et probablement beaucoup de préjugés de classe au sujet des premiers et plus grands "consommateurs" de bouddhisme et de développement personnel en France, bien qu'ayant apparemment tout dit et peut-être même trop dit du fond de ma pensée à ce sujet, bien qu'après tout il est un droit inaliénable que d'avoir des goûts philosophiques et une vision du monde qui ne soient point en accord avec les miens, bien que je sois persuadé d'être investi de la vérité divine sur l'ensemble des sujets que j'aborde, comme tout français qui se respecte et enfin bien que cette phrase soit beaucoup trop longue... (prenez le temps de respirer un coup, c'est presque fini), il me reste apparemment encore deux ou trois choses à dire sur ces bouddhas et sur cette philosophie bouddhiste qui semblent irrémédiablement conquérir aussi bien le cœur de mes compatriotes que leurs intérieurs, et particulièrement leurs salons.

Car au fond... Que nous dit véritablement un bouddha tel que celui-ci que vous voyez en photo ?
Ce qu'il nous dit, je gagerais, c'est la nécessité de se retrouver soi-même, c'est même le besoin de se retrouver, d'être à nouveau "authentique", mais plus encore...

... C'est de réussir à accomplir ce que tout philosophe depuis Socrate s'acharne à faire, ce qui prouve bien qu'au fond toute philosophie correctement conduite s'accorde avec n'importe quelle autre philosophie sur l'essentiel.
Ce qui se résume en deux mots en grec ancien, et en quatre en français moderne :
Connais-toi toi-même.
Ou pour les hellénistes érudits :
Γνῶθι σεαυτόν (Gnỗthi seautόn).

Car en effet, à quoi invite toute philosophie voire toute religion, sinon à cette ultime conquête intellectuelle, philosophique et spirituelle gravée au fronton du temple de Delphes ?

Quelle autre conquête peut donc être plus noble ? Quel autre combat peut donc être plus difficile et plus acharné ?

Et pourtant...
Pourtant malgré cette recherche acharnée de soi-même, cette lutte incessante de chaque être pour trouver sa vérité personnelle, doit-on toujours se connaître soi-même ? Le peut-on ?

Il existe de très nombreuses façons d'atteindre cette vérité individuelle, cette substance originelle de notre personnalité qui semble nous définir plus encore que tous nos actes d'adulte.
La confession, la méditation, la cure psychanalytique, la maïeutique, le voyage onirique... Tant de concepts, tant de méthodes cherchant une vérité ultime, telles des pratiques d'accoucheurs d'esprits.

Mais souhaitons-nous réellement nous connaître nous-mêmes ?
Souhaitons-nous réellement embrasser ce qui fait parfois l'horreur de la condition humaine, l'horreur de la pensée humaine ? Souhaitons-nous véritablement embrasser du regard nos lâchetés et nos indignités, nos peurs et nos préjugés, nos vices et nos folies ?

Cela, les guides autoproclamés qui nous accompagnent sur le chemin obscur de la connaissance de soi-même l'ont bien compris... Sinon, pourquoi le but présenté paraît-il toujours si luisant, si brillant, si étincelant, si lumineux et si pur ?

Mais pourrions-nous seulement soutenir le regard du monstre tapis en nous ?
Pourrions-nous regarder en face nos plus secrets démons ?
Pourrions-nous supporter le regard accusateur de nos souvenirs ?
Pourrions-nous ne serait-ce qu'accepter notre simple animalité ?
Pourrions-nous contempler la Mort en nous qui, chaque jour, s'avance un peu plus ?

Avons-nous réellement envie de nous connaître nous-mêmes ?




... Ou souhaitons-nous simplement vivre heureux en attendant la mort ?

mercredi 16 septembre 2015

La magie coule dans l'eau...

Vous savez, il est encore très peu de choses que je vous ai dites sur les secrets des forêts normandes.
En réalité je ne vous en ai encore rien dit si je ne vous ai point expliqué les origines de ces forêts.

Toute forêt naît de l'eau. L'eau qui tombe du ciel comme l'eau qui ruisselle à terre, l'eau qui s'infiltre dans le calcaire comme l'eau qui creuse les hautes montagnes.
Il y a ainsi dans toute forêt de Normandie au moins un cours d'eau plus ancien que la forêt elle-même.
Il y a ainsi dans toute forêt de Normandie une source de vie inépuisable sans laquelle chênes et hêtres, pins sylvestres et épicéas ne s'épanouiraient pas.

Il existe dans les environs de nombreux ruisseaux et rivières, certains aux noms bucoliques, comme celui-ci appelé "la Misère" et qui coule dans la vallée du même nom. D'autres aiment mieux les plaines et la ville, comme cette rivière, trop souvent improprement nommé ruisseau à Alençon, qu'on nomme "la Briante", sans qu'aucun historien ne puisse attester de l'étymologie réelle, étant apparemment sans rapport avec le mot "brillante".
Je pourrais aussi bien vous parler de l'Huisne, paisible cours d'eau du sud de l'Orne, ou de la bien-nommée Vie (sic), traversant la commune de Survie (re-sic) au beau milieu du même département...
Il existe tant de cours d'eau en Normandie, et tant semblent anecdotiques...
Aucun d'eux ne l'est pourtant.

Chargés de la vitalité d'une nature forestière et campagnarde sans cesse renouvelée, ces cours d'eau furent certainement au cœur de nombreux et anciens rituels païens, car enfin, comment expliquer sinon que les plus anciens arbres alimentés par ces eaux lumineuses se mettent, au crépuscule de leur vie naturelle, à murmurer, discuter entre eux... Et même se déplacer ? Comment sinon expliquer la noire corruption de cette fameuse parcelle sauvage d'Écouves la Grande ? Comment, sinon par l'éveil d'un Saule au cœur sombre comme la mort ? Et qui pouvait l'éveiller ? Quelle force mystique pouvait lui donner la force de troubler les âmes innocentes et imprudentes passant dans les parages ?

Je vous le dis de but en blanc : la magie coule à jamais dans les veines du monde que sont les cours d'eau.
Non pas la magie blanche. Encore moins la magie noire. Ni même la magie rouge. Non, la magie dans son aspect et sa nature la plus brute. Cette vitalité naturelle que nous avons tort de classer parmi les maléfices, nous autres xylomanciens, nous qui avons pour charge la paix entre arbres rancuniers et humains naïfs.
Les magies noires, blanches et rouges ne sont, de mon avis de xylomancien expérimenté, que la simple classification humaine opérée à partir de nos réactions et sentiments humains, ou, concernant quelques-uns parmi nous, partiellement humains.

L'hydromancie est en effet la base de notre savoir, celle qui fonde toute magie, et elle se révèle d'une puissance sans commune mesure avec les autres éruditions magiques que j'ai pu pratiquer au cours de nombreux siècles. Comment exprimer simplement ce qu'est la magie de l'eau, sinon comme étant "la magie primordiale" ?
C'est cette magie qui ensorcela le cœur des derniers Elfes en entendant le cri des mouettes.
C'est encore cette magie qui façonna lentement les paysages, leur accordant l'honneur d'habiter la vie.
C'est toujours cette magie qui éveilla certains arbres à la conscience claire de leur environnement.
C'est enfin cette magie qui nous emmènera à travers la Voie Droite vers Valinor quand l'heure viendra pour nous de nous retirer.


Il n'est point de source magique plus puissante qu'une rivière forestière...

Ingole celutar minanindar

samedi 12 septembre 2015

Tout ce qui est or ne brille pas...

Existe-t-il des miroirs plus déformants que ces reflets que nous offrons à la vue de tous, que ce soit sur Internet ou en bonne société ?
Ainsi, un blog comme celui-ci est un miroir redoutablement déformant une fois entre les "bonnes" mains. La maîtrise de la langue est pour ainsi dire l'outil le plus radical pour falsifier son apparence, sa personnalité. Elle est tel un flou artistique ou un miroir convexe : une fois maîtrisée, celle-ci déforme les aspects que l'on souhaite déformer jusqu'à rendre méconnaissable l'auteur, jusqu'à même le masquer derrière de splendides oripeaux aussi factices que séduisants.

Mais qu'en est-il en société ? N'étant guère adepte des soirées mondaines, et même plus proche de l'ours dans sa grotte au fin fond des bois que de tout autre animal, je ne saurais que témoigner du comportement d'autrui en de telles situations.
Au vu de la nécessité de briller, de ne présenter aucune aspérité, de garder les "bonnes convenances" en toutes circonstances, il est évident que la tentation de contrefaire sa personnalité, ses idées et ses envies est grande.
Ainsi l'on voit, dans ces soirées mondaines, des coqs qui caracolent, des paons qui déploient leur roue, de grands félins grondant dans de grandes farandoles... Mais aucune trace de sensibilité, de vulnérabilité ou d'hésitation.
La bonne société n'admet que cela : la force, la volonté, le courage. Valeurs cardinales érigées en impératifs absolus... Au point d'en nier les faiblesses, les fragilités et les sentiments...

Tout ceci est finalement peu différent, sur ce blog. Ici non plus aucune aspérité, seulement le chatoyant et le luisant, caractéristiques communes des lieux où l'apparence compte et des périodes de l'année où vérité et amertume sont à la fois rejetées.
N'est-ce qu'un hasard si plateaux de télévision et sapins de Noël partagent une même passion pour la chatoyance et l'illumination à outrance, jusqu'à ce que certains spectateurs en frisent le malaise ?

Il serait tout à fait pertinent de relever une certaine tendance ignacienne à rejeter les ors et les honneurs, comme s'il s'agissait de souillures en soi, dans le sous-texte de ce billet...
Mais pour reprendre les mots d'un grand auteur catholique du XXe siècle qui n'aurait certes pas rejeté une éducation jésuite :


Tout ce qui est or ne brille pas... 

 Et s'il est vrai que la contrefaçon des apparences n'est que peu de mon goût (ce qui est certes une façon ironiquement convenue et hypocrite de me présenter sous un jour aussi favorable, vous en conviendrez) et pourtant presque systématiquement une règle que moi-même j'applique en public, quitte à me mentir moi-même...

... Il reste encore la photo pour développer une idée et son opposé.
Car qui croirait au miroir déformant que me tendait cette boule brillante complètement abîmée ?

Même vous qui ignorez mon apparence le voyez clairement : Cette photo ne me montre pas. Elle ne montre que ce que j'ai voulu vous montrer.
Cette image est donc un avertissement face au brillant de ce coin d'internet...

Tout ce qui est or ne brille pas...

mardi 8 septembre 2015

De vert et d'eau...

Alençon est une cité aquatique.
Je sais, cela surprend quand on a déjà eu l'occasion de se rendre dans cette petite préfecture aux confins de la Normandie.
Pourtant, Alençon est bien une cité aquatique.
Coulant au travers de la ville, la rivière Sarthe apporte à ses habitants l'eau nécessaire à leurs douches, leur vaisselle, leur soif et tant d'autres choses.
Mais les alençonnais aiment la Sarthe pour une raison qui leur est propre.
Car Alençon est une ville d'eau.
Flânez un jour de printemps sur les bords de la Sarthe, alors que le Soleil brille et qu'une douce chaleur se répand sur la ville. Posez-vous quelques instants sur un banc et écoutez l'eau.
Longez la Sarthe au niveau de la rue de la Fuie, goûtez aux raisins suspendus au-dessus de votre tête.
Abritez-vous d'une averse dans un des nombreux lavoirs encore présents au bord de l'eau.
Traversez le parc Courbet et l'Arboretum en zone humide, la rivière coulant doucement à votre gauche. Un matin, vous serez surpris de constater que de nombreux lapins aiment à se retrouver dans les hautes herbes dudit arboretum, fuyant comme des ombres à votre vue. Puis, allez à la base de canoë-kayak, sur un chemin de terre ombragé par de beaux saules (toutefois gare à leur malice parfois peu amène)...
Alençon est une ville d'eau et en conséquence de cela, la mairie a entrepris des travaux de mise en valeur de ce patrimoine... Car tous les kayakistes vous le diront... Le visage d'Alençon se transforme depuis la Sarthe.

Il existe en effet de très nombreuses villes miteuses et mourantes comme Alençon. Des villes au passé industriel ou minier. Des villes frappées par la crise et les décisions politiques hasardeuses ou peu soucieuses du destin des petites communes urbaines.
Mais il n'existe finalement que peu de villes dont l'apparence change à ce point à bord d'un kayak. Du gris bétonné triste patché bitume et pavés usés, la ville se révèle à ce qu'elle fut jadis et aurait dû être de nos jours...

...Un joyau aquatique et végétal. Une de ces balades sur l'eau vous dépayserait au point, par moments, de vous faire penser à la Comté hobbite du Professeur Tolkien. Car oui, Alençon est une ville verte, près de l'eau.

Au final, Alençon est tout à fait à l'image de la Normandie. Un joyaux caché derrière une pauvreté grandissante et un délaissement politique et économique général. Une de ces beautés qu'il faut connaître pour pleinement les apprécier.



Alençon n'est guère une ville où passer ses vacances, je le concède fort bien. Ce n'est d'ailleurs qu'à peine une ville où travailler.
Cependant, j'affirme qu'un bon guide du cru, un alençonnais aimant sa ville, saurait vous la faire apprécier comme moi-même je finis par apprécier de parcourir ses rues, loin des clichés d'un office de tourisme concentré presque exclusivement sur le tourisme religieux de Sainte Thérèse et sur la dentelle au point d'Alençon.

Ouvrez l’œil sur les détails cachés au sein des rues, au sein des rives. Et vous verrez qu'en effet...


Alençon est une ville d'eau et de verdure...

vendredi 4 septembre 2015

Songes cotonneux...


Nés au fin fond des océans,
Uniques et grands géants,
Allégories de la liberté,
Gullivers aéroportés,
Enfants de la Terre,
Saints fils de l'Air...


.




Cieux estivaux.
Une tortue mange une oie
Entre deux guépards.

mardi 1 septembre 2015

Le bouddha de mère-grand...

"Tu veux le journal, mon chéri ? Il est sur la table !", ainsi m'apostrophait ma grand-mère depuis sa cuisine tandis que je répandais mon regard dans les coins et recoins de son salon, tel un magma particulièrement visqueux, s'accrochant et coulant le long du moindre des bibelots qui chargeaient la pièce. Il faut dire que ma grand-mère aime les bibelots de toutes sortes. Elle en a même une vitrine complète, majoritairement composée de hiboux et autres chouettes.
Au-dessus de ladite vitrine trônait un autre bibelot, parmi les plus anciens que je lui connaisse; un bouddha doré et cuivré..
Ce bouddha, plus que tout autre bibelot du lieu, est un des symboles que j'associe le plus à ma grand-mère. Parce qu'il est chatoyant et luisant, il attirait mon œil dès le plus jeune âge et je n'ai pas souvenir de cette salle sans ce bouddha cuivré.
Par ailleurs, son apparence exotique correspond tout à fait à ma grand-mère qui, même il y a encore dix ans se permettait des vacances aux quatre coins du monde, afin d'admirer les nombreuses, fragiles et malheureusement parfois maintenant disparues merveilles artistiques que les peuples du monde ont dressé pour la postérité.
Il est amusant de constater que, du fait de mon attachement pour la propriétaire des lieux et néanmoins membre importante de ma famille, j'ai toujours associé ce bouddha en tailleur à une certaine sérénité et satisfaction -ce qu'il est d'ailleurs censé représenter- alors que le bouddhisme est une de ces religions qui ont tendance à me donner de l'urticaire.
Non pas que le bouddhisme ait donné naissance à plus d'aberrations philosophiques que les autres théories philosophiques, mais la simple mode en Europe des préceptes bouddhistes comme façons d'atteindre le bien-être me donne par moments de la tension.
Cette mode me fait penser au film Wasabi, dans lequel une jeune japonaise au cœur de l'intrigue porte un magnifique pull-over en laine arborant des lettres latines, comme d'autres vêtements en France porteraient des kanjis. Ironiquement c'est ce goût pour l'exotisme et la croyance dans la sagesse des vieux maîtres de contrées "lointaines et moins corrompues par le rapport à l'argent" que je soupçonne d'être à l'origine de cette passion bouddhiste chez tant d'occidentaux en mal de cours de philosophie.
Non pas qu'on ne puisse trouver des choses pertinentes chez les penseurs orientaux, voire même y puiser des concepts utiles pour sa vie personnelle, mais je doute qu'il y ait tellement d'occidentaux élevés à l'occidentale qui soient en mesure de percevoir le bouddhisme comme un chinois, un tibétain ou un japonais. Je parle là d'une vision exotique d'une religion qui demande un peu plus de réflexion que ces résumés qu'on peut trouver dans des livres et magazines de développement personnel.
Plus encore, et alors que ma grand-mère m'appelait pour me faire venir à table, je me demandais dans quelle mesure un bouddhiste de Chine ou du Vietnam accepterait qu'on use d'un bouddha, objet religieux par excellence, comme d'une simple décoration dépouillée de tout son lustre mystique.
De la même manière, j'imagine que peu de chrétiens comprendraient qu'on utilise un crucifix comme on pourrait utiliser un faux Brueghel en canevas ou qu'on le présente à ses invités comme "un souvenir d'Europe". J'avoue que, face à un tel comportement, j'ai par moments l'impression que nos vieux comportements de "colonisateurs blancs détenteurs du progrès" (avec tous les aspects négatifs que cela comporte) ne sont pas totalement effacés.


Mais l'espace de quelques seconde, j'imaginais un Jésus crucifié bronze et or au milieu de représentations miniatures kitsches du saint Chrême et autres vierges maries de bazars... Et je me mis à sourire...
Malgré ce que sous-tendent ces réflexions, comme le colonialisme intellectuel et l'exotisme, je me pris à rêver qu'un jour finalement il y ait effectivement des crucifix décoratifs flirtant -pourquoi pas- avec un certain kitsch dans les maisons de vieilles dames japonaises voire même -gare au blasphème- des Ka'aba-souvenirs dans les marchés de Shangaï...
Ne serait-ce que par un goût immodéré pour l'absurde, j'en trouverais l'idée presque poétique.

Cela existe-t-il ?
C'est tout à fait possible. On n'arrête pas les marchands de souvenirs.

vendredi 28 août 2015

L'obscur secret d'Écouves la Grande...

Vous n'imaginez pas tous les secrets que renferment les forêts de Normandie. Des secrets aimables, des secrets cocasses, des secrets immaculés, mais aussi de terribles, terribles secrets.
L'un d'eux nous emmène dans un de ces marécages forestiers que seuls les locaux connaissent. Un de ces endroits dont le nom remplit d'épouvante les bonnes gens de la région, synonyme de mort, de malédictions et d'effroi.
Ce marigot se situe sur le versant Nord d'Écouves la Grande, le versant le plus sauvage et le plus hostile de cette immense forêt domaniale, dans une parcelle étrange, où règne un Saule, souvenez-vous...
En réalité, il s'agit très précisément du marécage même où le Saule amène ses victimes innocentes et les tue.
Moi-même, bien qu'étant illuminé par la confiance divine que procure la foi en Eru Ilùvatar et connaissant les mots de pouvoir permettant de résister au Mal résiduel des Huorns sombres, tel ce Saule, je ne pouvais que prendre d'infinies précautions avant de m'y aventurer. Car en effet, étant fils d'Elfe et de Béornide, il est de ma responsabilité de régulièrement m'aventurer dans ce genre de lieu maudit afin de conjurer le Mal, de sorte qu'il soit éternellement tenu en échec, sans avoir toutefois la force de le vaincre définitivement. Mais qui donc le pourrait seulement depuis le départ des derniers Elfes ?
C'est ainsi que je me plongeai, peu avant le crépuscule, dans l'ombre de cette parcelle maudite, armé de ce fameux appareil photographique qui m'avait déjà permis de briser un sortilège de Saule dans une autre forêt...
Au firmament, l'étoile d'Eärendil m'accompagnait depuis une demi-heure déjà, pataugeant plus que traversant le marais quand soudain la Nuit s'installa subitement.
Non pas la nuit humaine que nous connaissons tous. Non, la Nuit synonyme de maléfices et de malfaisance. Je sus que je touchais au but.
Tâtonnant autour de moi, je sentis par un frisson glacé qu'une des plus grandes sources du pouvoir du Saule était toute proche. Cela ne semblait être qu'une vieille souche, à l'odeur pestilentielle de mort et de pourriture. Je sortis alors mon appareil photo, le mis en tension, et, d'une voix forte, emplie de toute la foi en Eru que je pouvais rassembler, j'articulai ces mots de pouvoir : Aiya Eärendil, elenion ancalima ! Soudain, une lumière proprement aveuglante après ces longues minutes de noirceur chassa cette Obscurité opaque. Je pris avec célérité mon appareil, et fis chanter l'obturateur avec empressement.
Une pénombre menaçante eut à peine le temps de ronger la lumière d'Eärendil que je vis apparaître la photo de la souche sur l'écran de prévisualisation de mon EOS.
À cet instant, un hurlement monstrueux d'écorces, de feuilles, de vent et de rocs monta au ciel. Ici ou là, quelques lueurs montèrent du fond des eaux pour échapper à la cime des arbres.
Je sus que le sortilège du Saule venait d'être rompu.




Quelques semaines plus tard, lisant comme à l'accoutumée l'Orne Hebdo un mardi vers 14h, je vis cet entrefilet entre deux articles des pages Tribunal et Faits de Société :

Découverte macabre aux Petits Riaux

Jeudi 9 Juillet, aux Petits Riaux, un promeneur anglais témoigne avoir retrouvé des ossements suspects flottant à la surface de la tourbière. Rapidement arrivée sur place, la gendarmerie a emporté les ossements à des fins d'analyse scientifique. L'enquête en cours, d'une source proche du dossier, semble indiquer un lien avec la disparition non-élucidée de deux promeneurs bordelais en Juin 2006.


En mon for intérieur, je sus que le Saule avait déclaré forfait pour plusieurs années. Refermant le journal, je célébrai la nouvelle en reprenant une part de tarte à la rhubarbe.

Aux Petits Riaux, la vie était revenue...