lundi 16 novembre 2015

Au-delà des palais de la Réalité...


[ndTontonGilles : J'ai hésité à laisser paraître ce billet comme prévu ce 16 Novembre, compte tenu des événements de vendredi dernier. Mais après mûre réflexion, je pense que les circonstances réclament justement de rêver, rêver plus et rêver notamment de bienveillance... En ces jours troublés, revendiquer la bonté, sinon comme une force naturelle, au moins comme le seul espoir d'un avenir heureux... est probablement l'acte politique le plus sage -et le plus subversif- qui soit. Aussi je vous souhaite de bonnes rêveries sur ce blog...]


Les licornes existent. Je leur ai parlé.

C'était un après-midi de Novembre, un de ces après-midi courants à cette période de l'année; brumeux, gris, voire monochromatique.

Nous nous promenions dans la rue Wilson, à Alençon, mon père et moi, en vue de nous rendre à la Librairie du Passage, en centre-ville, commerce bien connu et pour ainsi dire la seule librairie viable des alentours. Soudain, un détail attira notre attention.

Une tête de licorne, encastrée dans le bas d'une façade de maison.
Détail cocasse, voire amusant. Pourtant, quelque chose dans le regard de cette décoration d'un autre âge m'interpelait.
Car en effet, d'où venait-elle ? Autour de nous personne ne semblait la voir, malgré le passage régulier des badauds.
Je crus bon de marmonner quelques paroles sacrées en Quenya, par prudence, mais... rien.

Supposant qu'il n'y avait donc aucun danger, que ceci était juste un de ces détails incongrus dans les vieilles villes, je m'approchai, mis mon reflex préféré sous tension, fis quelques réglages et appuyai sur le déclencheur...

Soudain, j'eus un voile noir et, tandis que ma conscience revenait, je m'égarai hors de la pensée et du temps. Les étoiles tournaient autour de moi, et chaque jour était aussi long qu'une existence sur la Terre. Mais il n'était pas temps pour moi de quitter ce plan hors de la réalité. Je fus projeté devant une présence, une présence en forme de licorne, et cette licorne était invisible, mais sa présence m'apparaissait comme rose.

Elle me fixa de ses yeux roses et invisibles et commença une très longue discussion entre nos deux esprits sur notre monde, ses origines, son Histoire, sa fin prochaine. J'étais à la fois terrifié et émerveillé. Terrifié car je percevais en une fraction de seconde toute la violence, toute la souffrance, toute la colère, toute la cupidité de notre espèce humaine, mais aussi émerveillé, car cette présence invisible de licorne rose me procurait un sentiment de félicité totale, et je sus alors que cette dernière ne nous abandonnerait pas, quoi que nous fassions.

Timidement je tentai d'approcher ma main vers "Elle", mais au moment où mes doigts frôlèrent son invisible crinière, je fus à nouveau empli d'un total voile noir.

Au loin, dans le noir, quelqu'un m'appelait.

J'ouvris les yeux.
Mon père se tenait au-dessus de moi. Il semblait passablement inquiet. Je lui souris... sourire qu'il me rendit.
Je me redressai lentement, un peu engourdi.




Que s'est-il passé, papa ?

Ben, tu as basculé en arrière en prenant une photo et tu as heurté le sol. Ça a fait un bruit terrible.
Tu... tu es sûr que ça va ? Tu as eu de la chance, tu n'es resté assommé que quelques secondes !


Oui... oui, ça va même très bien ! Je suis juste un peu fatigué... Cela te dérange-t-il si on abrège notre promenade ?

Tu ne veux pas qu'on aille aux urgences ? Ce serait plus prudent...

Non... Non. Je sens que rien n'est abîmé, et je n'ai même pas mal au crâne. Le sac de mon appareil aura amorti le choc de ma tête.

...Très bien, rentrons. Mais tu me tiens au courant ce soir si jamais... ?

Ne t'en fais pas, je te tiendrai au courant.



Alors que le soleil de 17h commençait à se coucher, je levai les yeux vers le lointain et murmurai...

Il est sage de voir la vie en rose quand nous ne sommes pas seuls...

Que veux-tu dire par là, Gilles ?


Rien... Rien de rationnel. Tu ne comprendrais pas... Je ne suis moi-même pas sûr de comprendre. C'est...Comme une présence invisible qui serait de couleur rose. Comme quelque chose que nous ne sommes pas faits pour comprendre.

Moi, je dis que tu t'es cogné la tête trop fort...

1 commentaire:

  1. Heureusement que je sais qu'il n'y a pas plus sobre que toi. Belle définition ta photo.

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