L'argent coulait à flots.
Des milliers de pièces clinquantes coulaient comme d'éclatantes pièces d'orchestre dorées, argentées ou cuivrées.
L'argent coulait à flots.
Chaque habitant de la capitale se couchait chaque nuit sur un véritable magot de métal miroitant. L'on disait qu'un bain d'argent, de ce délicieux argent, donnait la jeunesse éternelle.
L'argent coulait à flots.
Il n'existait pas un centimètre carré de terrain qui ne contenait pas quelque sac rempli d'une fortune quelconque. Les gens ne cachaient pas leurs économies à la banque.
L'argent coulait à flots.
La banque d'Etat fabriquait de l'argent par centaines de kilos au quart d'heure. Nous étions tous riches et opulents, caressant l'idéal d'une paix achetée à prix d'or et coulant à jamais des jours tranquilles.
L'argent coulait à flots.
Nous étions tous concentrés sur notre argent, n'écoutant pas les nouvelles d'autres contrées. Nous aspirions tellement à notre calme.
L'argent coulait à flots.
Pourtant, cet argent venait de quelque part. Le germe de la discorde prenait racine sournoisement, sous nos yeux.
L'argent coulait à flots.
Certains souhaitaient subvenir aux besoins du reste du monde avec leur argent. Mais couvait la colère en ces contrées délaissées.
L'argent coulait à flots.
Ces citoyens oubliés, ces nations oubliées par notre capitale ne voulurent plus commercer avec nous. Nous commençâmes à souffrir du manque de biens nécessaires.
L'argent coulait à flots.
Quelques olibrius cédèrent une masse sensible d'argent contre de la nourriture avariée et carencée. Les nations oubliées ricanèrent.
L'argent coulait à flots.
Car le moindre cent de notre argent valait des contrées entières, ailleurs. Contrées achetées contre du travail et des tickets de rationnement.
L'argent coulait à flots.
Bientôt les nations oubliées s'unirent pour réclamer la cession des superbes usines où leurs citoyens travaillaient.
L'argent coulait à flots.
Certains tergiversaient, mais presque toute la capitale refusa ce marché. Nous étions censés faire fructifier notre argent, pas le laisser à des nécessiteux !
L'argent coulait à flots.
Nous refusâmes de concert, dans un unisson sinistre et mortel. Les peuples oubliés se devaient de travailler pour vivre.
L'argent coulait à flots.
Notre monnaie ne valait soudain plus rien. Nous importions tout contre du travail illimité. Mais personne n'exportait plus. Nous étions une île perdue au milieu d'un continent.
L'argent ne coulait plus.
Vint alors le chaos sur notre drôle d'île continentale. Les plus civilisés des citoyens de la capitale devinrent de cruels coyotes en quête de chair humaine. Les nations oubliées nous contemplèrent.
La capitale n'existait plus.
Donec eris felix, multos numerabis amicos...
RépondreSupprimerLe chaos n'est qu'un cahot dans l'histoire de cette humanité.