lundi 15 février 2016

De l'art de causer de course à pied...


La photographie est indubitablement un art. Ceux qui la pratiquent à très haut niveau le prouvent sans relâche à l'aide de clichés de toute beauté.
Voir dans la photographie une simple technique relèverait quelque peu du mépris pour ce que les plus grands photographes au monde ont pu réaliser.
À mon humble niveau, nous ne parlerons certainement pas d'art mais de technique et d'apprentissage long et laborieux; d'abord parce que beaucoup de mes photos démontrent par elles-mêmes un manque de maîtrise de la technique et de la composition, et ensuite parce qu'elles pointent également du doigt un manque pourtant essentiel à l'art : l'expressivité.
En effet, si l'art se doit de mentir pour dire la vérité, ou à défaut de travestir la vérité pour mieux la dévoiler, il est clair qu'en pareil cas je ne saurais prétendre faire de l'art.
Mes photos ne dévoilent qu'une vérité crue à un instant donné, sans aucun message, ou si peu.
C'est là la limite de mon talent en photo et la raison pour laquelle je les accompagne systématiquement d'un texte sur ce blog.

Pourtant, il est un domaine de la photo, un domaine que je ne maîtrise guère, où le message est pourtant évident, se jette à notre figure.
Ce domaine est celui des photos de course à pied.
Car en effet, le sport, et particulièrement la course à pied, est un sujet que j'aime traiter depuis peu.

Et tout aussi curieusement, je traite ce sujet avec force portraits au 300mm, ce qui reviendrait un peu à cuisiner avec des gants de boxe pour la pratique habituelle du portrait mais convient "curieusement" très bien à ce type précis de photos.

Or s'il est un domaine où l'expressivité des personnes est totale, s'il est un domaine où, à moins de beaucoup de mauvaise foi, l'on ne peut que réussir de beaux clichés, c'est bien la course à pied en compétition.

Une telle pratique requiert cependant une certaine endurance, à l'instar des coureurs, pour tenir durant le temps de la course, debout à son poste, un appareil photo doté d'un gros objectif à longue focale, tous deux relativement lourds d'habitude, tous deux très lourds au bout d'une heure de prise de vue ininterrompue.

Comprenez par là qu'une course, c'est généralement beaucoup de coureurs qui se succèdent à un rythme effréné.
Qu'au bout de trente minutes vous aurez déjà les bras douloureux si vous ne vous êtes pas équipés d'un bon pied et enfin qu'il faut une attention de tous les instants pour essayer de rater le moins de coureurs possibles.

Certains photographes, apparemment, se concentrent essentiellement sur les premiers, les têtes d'affiche, comme des paparazzis mitraillent des starlettes.
De mon point de vue, c'est une aberration, un manque de respect flagrant envers la foule des coureurs à pied qui, tous, sont méritants, les derniers sans doute plus encore que les premiers, et enfin un grand gâchis de photos.

Car... Que d'expressions afficheront les photos prises : à travers les photos se dessinent la souffrance, l'exaltation, la concentration, la ténacité, la colère, la tristesse, la fatigue, la hardiesse...
Ces coureurs en plein effort expriment à cent pour cent ce que leur passion leur apporte, ce qu'elle leur fait subir et ce qu'elle leur développe.
Dans la foule des runners, les plus beaux sont incontestablement ceux dont on se doute qu'ils ne sont pas des acharnés du sport. Ce sont de véritables gueules qu'on peut alors apercevoir, des gens dont le visage passe inaperçu dans la rue révèlent alors toute l'originalité de leur apparence, leur caractère. Dans l'effort se dessinent des continents entiers d'une histoire personnelle plus vaste que mille systèmes solaires, ces continents en plein chamboulement tectonique effleurent puis percent la surface des flots de sueur qui trempent leur corps et leurs habits.
Dans l'effort, les plus beaux sont incontestablement les derniers.

Dans l'effort, enfin, les derniers sont incontestablement les plus méritants. Non seulement en raison de la durée de leur épreuve, mais aussi hélas en raison du fait que beaucoup de spectateurs ne s'intéressent guère à eux, partis vers l'arrivée avant leur passage pour applaudir les podiums des premiers.

Comme déjà dit, je considère cela comme un manque de respect envers ces coureurs. Je ne puis prétendre avoir fait beaucoup de séances de photo de course à pied (en réalité 3 seulement en 2015), mais je tiens à chaque fois à tenter la photo du ou des derniers. Ce sont incontestablement mes chouchous. Ils sont beaux, courageux et volontaires. Rien que pour cela, ils méritent qu'on se souvienne d'eux.



Quant aux quelques intéressés qui se demanderaient quel genre de photos ai-je pu faire et où les voir, je vous conseille d'aller dans la rubrique Internautes de Normandie Course à Pied, et d'y chercher les photos prises par Lucas Jacquet, car il s'agit bien évidemment de votre serviteur ici présent.

S'il est vrai que 2016 ne m'a pas encore vu au bord d'une course, je compte cependant bien réparer cette faute dès que je le pourrai. Runners, prenez garde !

2 commentaires:

  1. Cette photo me fait énormément pensé à un passage du film "Big Fish"...
    J'aime énormément!!!

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  2. Photo prise le jour de la Vétérane de Damigny, à Damigny même, sur le circuit de la course. Réalisée sans trucage ni mise en scène ! :)

    Merci de ton commentaire. :)

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