mercredi 4 février 2015

Au cœur de l'Hiver...

Le cœur de l'Hiver battait sa lente chamade de mort et de gel. Déjà les nuances de couleur s'effaçaient au profit d'un gris brutal. Plus aucun oiseau ne chantait. Un silence opaque s'était installé sur les environs.
Sam s'arrêta un instant. Cette quiétude totale, ce silence, étaient autant de précieux secrets que la forêt pouvait révéler à ceux qui la connaissaient. Petit à petit les sens de Sam s'aiguisèrent. Il entendit au loin le craquement d'une brindille. Puis deux. Puis quatre. Puis vingt. Puis vinrent les croassements des corbeaux. Pas un ou deux. Une myriade. Les cherchant du regard, Sam tourna sur lui-même, inquiet..

Puis il les vit. Les corbeaux, perchés sur les branches d'un sapin, commençaient à se regrouper, produisant un vacarme sinistre.

Soudain, ce qu'il redoutait par-dessus tout advint. Le vent du Nord se leva. Non pas une simple bourrasque. Un vent aigre, froid, dur, strident, mortel.
Sam le sut alors. Les autres seraient bientôt là.
Commençant à courir sans aucune idée de la direction à prendre, il s'enfonça désespérément dans les entrailles de glace de cette noire forêt.
Déjà il les entendait, sans comprendre leurs funestes paroles. Parti chasser du daim, il était devenu gibier. Cette maudite forêt ne lui permettait pas de se repérer. Il eut plusieurs fois l'impression d'être retourné sur ses pas.
Pourtant, inlassablement, il avançait.

Épuisé, éreinté, Sam trébucha sur de sournoises racines et tomba tête la première dans la neige fraîche.
Les corbeaux croassaient à présent sur l'arbre au-dessus de lui.
Il le savait, c'était la fin du voyage. Les autres l'avaient rattrapé. Il contemplait le bleu givré de leurs yeux autour de lui. De toutes ses forces, Sam pria ses vieux dieux de lui venir en aide. Ne répondit que le souffle de la mort froide, l'enserrant dans ses bras, congelant sa chair et son air.

Ses muscles, sa peau, sa graisse, noircis par la brûlure du givre s'amenuisèrent. Sa conscience s'éteignit définitivement. Et tandis que ses paupières s'ouvraient sur des yeux d'un bleu glacé, la bête en Sam s'éveilla, reconnaissant ses pairs autour d'elle.

Un nouveau marcheur blanc était né.

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