C'était une de ces soirées d'hiver naissant, où l'automne n'en finit pas de mourir.
L'azur du ciel avait fait place à une nuance plus pâle de bleu, entrecoupé de la blancheur presque spectrale des cumulus.
Le Soleil, lui, baignait la scène devant moi d'une lumière ambrée.
Les feuillus en sommeil se battaient encore, rivalisant de nuances de doré, de rouge, d'orange avec le peu de follicules qui leur restait.
Les résineux, eux, se gargarisaient d'un vert presque aussi lumineux que l'herbe.
Les différentes plantes de bords de Sarthe, elles, se contentaient d'un ocre raisonnable.
Et la Sarthe, parlons-en ! Véritable miroir à cette déferlante de couleurs, nul ne savait comment définir sa dominante.
Cette orgie de tons encore automnaux n'était, certes, plus faite pour durer. Il subsistait néanmoins en cette ripaille de couleurs variées l'envie de resplendir aux yeux des courageux promeneurs hiémaux.
Au cœur d'une ville normande, à quelques dizaines de mètres d'une modeste avenue, la splendeur naturelle se permettait un dernier concert avant son long sommeil de glace.
Le vent bruissait dans les arbres.
La Sarthe ruisselait calmement dans son lit.
Les canards colverts s'ébrouaient gaiement sur la berge.
Les promeneurs faisaient crisser le gravier des chemins de bord de Sarthe.
Mon appareil photo faisait chanter le doux son de son obturateur mécanique avec délice.
Les chiens de compagnie aboyaient gaiement auprès de leurs maîtres, courant, détalant à leurs côtés.
Ce n'était qu'en tendant l'oreille qu'un observateur attentif pouvait percevoir le bruit des tacots roulant à vive allure.
Mais même les plus belles choses ont une fin.
Le ciel finit par s'assombrir, les nuages par masquer le Soleil, les dernières feuilles par tomber, la Sarthe par ne plus refléter qu'un vague marron à sa surface.
De la douce brise d'alors, ne subsista plus qu'un air lourd et pesant, accompagné de peu aimables bourrasques.
Les quelques canards restants cherchèrent endroit plus limpide pour se sustenter.
Les promeneurs se réfugièrent bien vite à l'abri dans leurs foyers, emportant leurs chiens avec eux.
Quant à mon appareil photo, il se décida à entrer dans un sommeil cryogénique, manquant d'énergie, manquant de lumière avec laquelle se nourrir.
Le ciel était devenu d'un gris de plomb, ternissant les nuances de vert, d'ocre, de rouge, de doré, blanchissant le Soleil, détruisant toute subtilité chromatique dans le paysage.
L'Hiver était arrivé.
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RépondreSupprimer(commentaire d'Arielle)
Je vois que l'arboretum t'inspire grandement (ainsi que "A whiter shade of pale")
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