dimanche 8 mai 2016

L'ombre des grandes victoires...



Ce jour mérite un petit cours d'Histoire.

Car vous l'ignorez peut-être, mais on ne fête pas la capitulation allemande à la même date dans tous les pays.

D'abord, le 8 mai n'est pas la fête de la fin de la seconde guerre mondiale. Celle-ci prit fin le 2 septembre 1945 avec la capitulation du Japon, après deux funestes bombardements les 6 et 9 août de la même année.
Le 8 mai célèbre en France la fin de la guerre en Europe, en réalité. Cependant l'on comprend aisément les raisons de cette célébration dans notre beau pays : pendant les six années de guerre que dura ce conflit, nous vîmes fort peu de fantassins japonais et beaucoup de soldats allemands.

Mais saviez-vous qu'en Russie, la capitulation allemande est fêtée le 9 mai ?

En effet, l'acte de capitulation allemande est signé à Reims le 7 mai 1945 par le maréchal allemand Alfred Jodl devant les représentants des forces alliées américaines, britanniques, soviétiques et françaises. Cette reddition devait prendre effet le lendemain à 23h01 et concerner à la fois le front de l'Ouest (contre les forces américaines, canadiennes, anglaises et françaises, essentiellement) ainsi que le front de l'Est, où Allemands et Soviétiques s'affrontaient encore, malgré la prise de Berlin par l'Armée Rouge.
Voilà l'origine de notre 8 Mai. Il symbolise donc l'arrêt des combats et la reddition des forces allemandes en ce qui nous concerne.

Cependant Joseph Staline prit ombrage de cette signature, car son intention avait été de faire signer la reddition à Berlin même, en territoire dominé par les Soviétiques. Les prémisses de la Guerre Froide étaient alors déjà bien engagés et l'on imagine sans mal que la décision de faire signer la capitulation à Reims était un de ces signes annonçant la longue confrontation entre les deux blocs jusqu'en 1991.

Finalement, Staline obtint de ses alliés une seconde signature de reddition des forces allemandes à Berlin-Est, dans la nuit du 8 au 9 mai. Cette fois-ci, l'heure de la signature complique un peu les choses : à l'heure d'Europe Centrale, la capitulation intervient le 8 mai à 23h01, soit le 9 mai à 1h01du matin à l'heure de Moscou.

De ce fait, dans toute l'Europe Centrale, et en fait dans tous les pays du bloc soviétique, la fête du 8 mai n'existe pas, étant fêtée le lendemain.


Pour l'anecdote, nous pouvons signaler que le 8 mai n'a pas toujours été férié en France depuis; en effet en 1959, le général De Gaulle supprime le caractère férié de cette fête, et en 1975, le président  Valéry Giscard d'Estaing supprime également la commémoration de cette victoire contre l'Allemagne dans un geste de réconciliation avec cette dernière. Il est raisonnable de penser que la construction européenne n'y a pas été étrangère.
Il faut attendre François Mitterrand et la loi du 2 octobre 1981 pour que le 8 mai retrouve sa commémoration et son caractère férié.



Pour finir, je tiens à rappeler que si de grands hommes se sont illustrés dans l'Histoire de la Libération, s'il est tout à fait acquis que ces personnes d'exception aimaient leur pays, n'oublions pas que ces derniers virent de leurs propres yeux à quels égarements peuvent mener le patriotisme et le nationalisme, qu'ils se battirent pour une France libre et non pour une France refermée sur elle-même.

Souvenons-nous-en, nous qui marchons encore dans l'ombre de cette récente Histoire de France...

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